Lundi 7 avril, le président de la RDC, Félix Tshisekedi, a annoncé par la voie de sa porte-parole, Tina Salama, la suspension de tous les contrats de lobbying avec les firmes et cabinets américains spécialisés en la matière. Selon la porte-parole, cette décision favorisera une coopération directe et des relations d’amitié solides entre les autorités américaines et congolaises.
Pourtant, ces contrats de lobbying représentaient d’énormes sommes versées par les autorités congolaises aux structures concernées. D’après les informations du média français Jeune Afrique, le contrat avec Earhart Turner LLC coûtait 5 millions USD pour six mois.
Le cabinet de Joseph Szlavik, vétéran de l’administration Bush et spécialiste de longue date de l’Afrique, percevait 70 000 USD par mois depuis 2022 avec Scribe Strategies. Un autre contrat liait Kinshasa à Ballard Partners, société dirigée par Brian Ballard, un ancien lobbyiste de Trump, pour 100 000 USD par mois. Enfin, le gouvernement avait signé un accord de 1,4 million USD avec Aaron Sean Poynton, ancien combattant de l’armée américaine et fondateur de la société de conseil en défense Omnipoynt Solutions
Pour quel résultat ?
Malgré les sommes importantes engagées par l’administration Tshisekedi, l’action politique des États-Unis en RDC est restée peu perceptible ces dernières années. Pour Michel Bisa Kibul, professeur de sciences politiques et relations internationales à l’Université de Kinshasa, les lobbyistes chargés d’influencer les décideurs américains en faveur de la RDC et de ses dirigeants ont échoué dans leur mission.
Selon lui, le recours à ces intermédiaires peut refléter, entre autres, « une diplomatie dépourvue d’intelligence stratégique (mercenariat diplomatique) ».
Le professeur explique que le président Tshisekedi, estimant pouvoir dialoguer directement avec l’administration Trump, a choisi de résilier tous les contrats liant la RDC à des firmes américaines de lobbying.
« Il a considéré que l’administration Trump pourrait lui offrir un canal officiel, rendant les lobbyistes superflus », précise Michel Bisa Kibul à Deskeco.
Toutefois, il redoute que cette rupture unilatérale ne déclenche un lobbying parallèle préjudiciable à la RDC. Aux États-Unis, ce métier est non seulement légal mais institutionnalisé. Une résiliation brutale pourrait ainsi exposer le pays à des poursuites judiciaires
Une coopération directe entre Kinshasa et Washington ?
L’hypothèse d’un partenariat direct entre l’administration Trump et le gouvernement congolais gagne en crédibilité depuis la visite en RDC, le 3 avril dernier, de Massad Boulos, conseiller principal du président américain pour l’Afrique.
Lors de ces échanges, les deux parties ont abordé les opportunités économiques entre les États-Unis et la RDC.
« Je me réjouis de collaborer avec le président Félix Tshisekedi et son équipe pour renforcer nos relations, au bénéfice de nos deux peuples, et encourager les investissements américains en RDC, notamment dans le secteur minier. Notre objectif commun est de favoriser une prospérité partagée », avait déclaré le diplomate.
Cette rencontre semble confirmer la volonté de Kinshasa de privilégier un dialogue officiel avec Washington, plutôt que de passer par des intermédiaires.
Bruno Nsaka