La question de la délocalisation de plus de 37.000 personnes au niveau du site énergétique dInga dans la province du Kongo Central a été au cur du Forum provincial de la Société civile du Kongo-central sur le projet Inga 3, organisé le samedi 20 juillet 2019 dans la ville de Boma, à linitiative de lOng ADEV (Action pour le droit, lenvironnement et la vie). Lobjectif fixé à cette activité qui a bénéficié de la contribution des experts en énergie, en environnement et en hydrographie, a été de susciter lintérêt de la Société civile provinciale pour une participation citoyenne et responsable en lien avec le projet Inga 3.
Ainsi, les acteurs de la Société civile venus de différents coins de la province du Kongo-central, ensemble avec les représentants des communautés locales de lhinterland du site dInga, ont discuté à cette occasion de la question des impacts sociaux et environnementaux qui surviendront lors des travaux de construction de la centrale hydroélectrique dInga 3, en relevant les points forts et faibles de ce méga projet dont lessentiel de la production sera consacré à lextérieur de la République.
A en croire un des experts conviés à ce forum, linquiétude reste totale quant à la matérialisation du projet Inga 3, car même le bief maritime sera négativement impacté par la rétention des eaux en amont, avec comme conséquence, la diminution en aval du débit du fleuve Congo. Pour la Société civile locale, lidéal serait de réhabiliter les machines en panne des anciens barrages dInga 1 et 2, et de créer des micro-barrages.
Notre source fait savoir en outre que le projet Inga 3 est un véritable sujet dinsomnie parmi les communautés locales dInga, car elles craignent la délocalisation de plus de 37.000 personnes autour du site qui auront certainement à perdre tous leurs biens, jusquà devenir des personnes sans terre.
Ces communautés du site dInga gardent encore des mauvais souvenirs avec la réalisation des barrages dInga 1 et 2, pour lesquels certains clans riverains sont à ce jour sans terre, et abandonnés à leur triste sort. Et elles sinquiètent du fait quelles ne sont même pas impliquées par le Gouvernement de la République pour ce qui concerne le projet Inga 3.
Petit rappel de la position de la Société civile face à Inga 3
Les organisations de la Société civile ont toujours persisté dans leurs inquiétudes relatives à la mise en uvre de ce projet, car elles estiment que la signature de laccord entre le Gouvernement congolais et les consortiums espagnol et Chinois pour le développement exclusif du projet Inga 3, laisse la part belle aux entreprises privées.
La part belle notamment de linitiative des études de faisabilité et dimpact environnemental et social, de la recherche de financement, du choix des matériaux et équipements, des travaux de construction, dentretien et de la gestion des ouvrages.
« Ce qui soulève beaucoup dinquiétudes pour la Société civile, quant à la capacité de lEtat congolais à en assurer le contrôle et le suivi, avec le risque de faire peser le poids de la dette résultant du projet aux générations présentes et futures. Mais aussi, pour labsence de réponses aux préoccupations antérieurement soulevées par la Société civile, quant à la consultation et consentement des communautés locales dInga, et celles habitant sur les sites visés pour les lignes de transport de lélectricité attendue de ce projet », rappelle un communiqué de la Société civile.
Ainsi, la Société civile a de tout temps conseillé lEtat congolais à renoncer au projet dInga 3, et à développer plutôt des micros projets hydroélectriques, moins coûteux et à faibles impacts, pour résorber le déficit énergétique en Rdc.
Idée globale du projet
Dans ses efforts pour combler le déficit énergétique à travers le pays (15 % seulement de la population a accès à lénergie électrique, en dessous de la moyenne africaine qui est de 30 %), le gouvernement congolais est à pied duvre pour réaliser une troisième centrale hydroélectrique au site dInga dans la province du Kongo-central.
Cest donc la première phase de laménagement du Grand Inga (complexe énergétique dune capacité de 40.000 mégawatts ou 40 gigawatts) en une série de projets hydroélectriques qui devront y être développés à partir du barrage dInga 3 jusquà Inga 8. Et dans ce seul complexe dInga sont concentrés au-moins 40 % de lénorme potentiel énergétique de la Rdc, estimé à 100.000 mégawatts (ou 100 gigawatts).
Deux grandes centrales hydrauliques existent déjà dans ce site : les barrages dInga 1 (dune capacité de 351 Mw avec six turbines dont deux seulement fonctionnent) et dInga 2 (dune capacité de 1424 Mw avec 8 turbines dont 5 en fonction), construits pendant la deuxième République.
Le projet Inga 3 était au départ Inga 3 basse-chute pour produire 4.800 Mw, dont 2300 Mw destinés à la satisfaction de la demande intérieure. Mais depuis peu, le projet a changé de format.
Le Gouvernement congolais et ses partenaires se sont accordés pour aller directement à la tête ou à la phase haute (de 4800 Basse-chute à 7500 haute-chute) avec une puissance installée de plus de 10.000 mégawatts. La République sud-africaine (RSA) a exprimé la volonté daugmenter son engagement du traité dInga de 2500 Mw à 5000 Mw. Et il y a aussi la demande régionale supplémentaire, en négociation avec le Nigéria, lAngola, etc.
Pour la demande intérieure, la Rdc prévoit utiliser 2500 à 3000 Mw dans le cadre de ce projet Inga 3 (pendant que pour Inga 3 basse-chute cétait 2800 Mw). Une bonne partie de cette énergie bénéficiera aux entreprises minières du Katanga.
Linvestissement matériel du projet sestime à 10,5 milliards de dollars américains (Usd). Les dépenses en immobilisation sont de lordre de 13,9 milliards Usd. Et le prix dachat de lélectricité est fixé à 2,52 Usd/Kwh.
Le financement du projet se fera sous le mode partenariat public privé (PPP : BOT - Build-Operate-Transfer (construction-exploitation-transfert), cest-à-dire que lautorité contractante a confié à lopérateur privé la construction, le financement, lexploitation et lentretien dinfrastructures et perçoit en contrepartie, sa rémunération sur les tarifs payés par les usagers afin de recouvrer ses coûts. Lactif est transféré à lautorité contractante dès lexpiration du contrat.
Lepetit Baende