Cet atelier est organisé dans le cadre du Programme Gouvernance des industries extractives (PGIE) du Centre Carter. Des parlementaires, des délégués des institutions publiques de contrôle notamment la Cour des comptes, des délégués des entreprises publiques minières, des acteurs de la société civile notamment des activistes de défense de la gestion durable des ressources naturelles ainsi que les journalistes, ont pris part à ces échanges.
Trois exposés ont été présentés au cours de cette rencontre. Le premier intervenant de lorganisation NRGI-RDC, Jean Pierre Okenda, a fait un état de lieu des entreprises publiques de la RDC du secteur extractif au regard de l « Indice de gouvernance ». Selon cet expert, lindice de gouvernance est lunique indice dédié à mesurer la gouvernance des industries extractives à travers le monde.
Lobjectif de cet indice est de : « Augmenter la conscience globale de défis liés à la gouvernance dans le secteur extractif ; Encourager un dialogue global avisé ou informé concernant la gouvernance du secteur extractif ; Garantir de meilleures choix politiques par le gouvernement, les parlementaires basés sur les données de haute qualité ; Engager un dialogue multi-acteurs plus approfondi entre la société civile, le milieu universitaire et le secteur privé ».
Plus concrètement, lindice de gouvernance évalue lexistence des règles, les lois ou politiques et pratiques actuelles liées à la divulgation de linformation, la transparence et le contrôle. Aussi, lindice de gouvernance permet-elle de comparer les entreprises sous examen aux autres du même secteur dans les autres pays.
« Le secteur minier de la République démocratique du Congo (RDC) nobtient quune note de 33 sur 100 pour la gouvernance globale de ses ressources naturelles. Ce qui le place à la 75e place sur 89 pays évalués dans le cadre de lIndice de gouvernance des ressources naturelles (RGI) 2017 », a dit Jean Pierre Okenda, présentant les résultats de lindice de gouvernance publiés en juin 2017.
Lenquête de juin 2017 a porté, en RDC, notamment sur deux entreprises dont la Gécamines pour le secteur minier et la Sonahydroc pour le secteur pétrolier.
Au regard des résultats de cette enquête, les entreprises congolaises sont soit dans la catégorie « Défaillant » ou « Médiocre » en ce qui concerne leur gouvernance.
La Gécamines est classée à la 53e place sur 74 entreprises publiques évaluées dans lindice de gouvernance de juin 2017.
Selon le rédacteur de ce rapport, la Gécamines sengage dans des nombreuses opérations de partenariat avec les sociétés étrangères. Cependant, selon Jean Pierre Okenda, ces partenariats ne sont pas transparents en ce qui concerne les procédures de sélection et les clauses juridiques et fiscales des contrats. De même, les bénéficiaires ultimes de ces concessions ne sont pas divulgués.
Cest le même verdict sévère qui est fait aussi du secteur pétrolier et gazier de la RDC. « Le secteur pétrolier et gazier obtient une note de 25 sur 100, ce qui le place à la 84e place sur 89 pays évalués dans le cadre de lIndice de gouvernance des ressources naturelles (RGI) 2017. Un environnement défavorable et labsence de transparence dans la gestion des revenus contribuent largement à ce résultat », note le rapport Indice de gouvernance de 2017.
Bref, le secteur pétrolier et gazier de la RDC est « un des plus faibles au monde de par son impact local et le partage des revenus quil génère ». « Sonahydroc figure parmi les compagnies pétrolières publiques les moins transparentes ; Sonahydroc se classe dans la catégorie «?mauvaise gouvernance?», parmi les 10 dernières entreprises publiques évaluées par lindice sur un total de 74 », a relevé lorateur.
Le deuxième intervenant, Jimmy Munguriek Ufoy, est le Secrétaire permanent du CdC et Membre du Comité exécutif de lITIE-RDC. Il a exposé sur les « Organes institutionnels de contrôle des entreprises publiques extractives ». Parmi les institutions habilitées à contrôler les entreprises publiques, il y a le Parlement à travers ses deux chambres et la Cour des comptes, a-t-il dit.
De son avis, « en RDC, les contrôles des entreprises publiques extractives par les institutions légales sont très faiblement exercées, mais avec des conséquences fâcheuses ». relevant plusieurs cas dillustration de lopacité et de labsence des documents de traçabilités, Jimmy Munguriek a indiqué que « le risque principal de labsence de contrôle efficace est la pratique de corruption tout au long de la chaîne de valeur ». Ce qui laisse la place à toutes les antivaleurs : « Pot-de-vin, clientélisme, favoritisme, trafic dinfluence lors des processus de signature des contrats; Détournement sous ses diverses formes (de largent, de projet) lors de lexécution des dépenses; Fausses déclarations des revenus et/ou rapport de gestion auprès de lITIE et de la Cour des comptes; Mauvaise affectation des revenus suite à la faiblesse de gouvernance ».
Dans sa conclusion, Jimmy Munguriek a estimé que pour éviter la persistance de la précarité de gouvernance des entreprises publiques extractives (EPEs) il y a nécessité que : « Le contrôle effectif et efficace reste un des moyens den améliorer; La volonté et lengagement de lEtat, des EPEs et des partenaires des EPEs à restaurer de manière effective les EPEs dans leurs rôles de moteur de léconomie nationale; La lutte contre les antivaleurs et les pratiques de corruption sous toutes leurs formes ».
Le professeur Florimond Muteba, Président du Conseil dadministration de lODEP a exposé sur « les défis de contrôle par les organes institutionnels de contrôle ». Dans son analyse, le professeur Florimond Muteba sest appesanti sur limportance de la Cour des comptes et sur la valeur ajoutée du contrôle des entreprises publiques.
Selon lui, ce contrôle est bénéfique pour lEtat, pour toute la société congolaise et particulièrement à la société civile. En effet, selon le professeur Florimond Muteba, la Cour des comptes renforce la reddition des comptes, la transparence et lintégrité des organisations. Les audits ne sont pas punitifs mais plutôt aident à améliorer la gestion, a soutenu le PCA de lODEP.
Cependant, pour permettre à la Cour des comptes de jouer pleinement son rôle, le professeur Florimond Muteba a relevé quelques préalable à savoir le renforcement de ses capacités institutionnels, le déploiement de la Cour des comptes en province, le renforcement des capacités de son personnel.
Après les débats avec les trois orateurs, les participants ont fait une série de recommandations devant aider à sensibiliser les décideurs à exercer un contrôle rigoureux sur les entreprises publiques pour que celles-ci améliorent leur gouvernance et pour quelles soient de plus en plus redevables vis-à-vis de la population.
Amédée Mwarabu