S’opposant à la décision du gouvernement de la République démocratique du Congo de procéder à la mise à la retraite de 300 000 fonctionnaires de l’État « sans garanties sociales », l’Observatoire de la dépense publique (ODEP) avertit que cette opération menace directement entre 2,1 et 3 millions de personnes, si l’on considère qu’un fonctionnaire congolais fait vivre en moyenne une famille de 7 à 10 personnes.
« Ce chiffre n’est pas anodin : il représente une proportion significative de la population active urbaine dépendante des revenus de l’État », peut-on lire dans un communiqué parvenu mardi 15 juillet 2025 à DESKECO.COM.
Sur le plan économique, poursuit l’ODEP, une telle mesure produit des effets en chaîne particulièrement lourds :
- Choc immédiat sur le pouvoir d’achat : la suppression du salaire, même modeste, réduit drastiquement la consommation des ménages. Or, dans une économie largement informelle et domestique, la consommation est le principal moteur de survie. Cela provoque une contraction des activités locales (petits commerces, marchés, transports), affectant aussi des emplois indirects.
- Baisse de la demande en biens et services essentiels : avec moins de revenus, les familles réduisent leurs dépenses de santé, d’éducation et d’alimentation. Cela affecte les prestataires locaux (cliniques, écoles, petits producteurs), ralentissant le tissu économique communautaire.
- Hausse de la pauvreté multidimensionnelle : en l’absence d’un filet de sécurité sociale solide, les familles se replient sur des mécanismes de survie : déscolarisation des enfants, recours au travail informel précoce, endettement familial, dépendance à la solidarité communautaire.
- Risque de désordre social : la précarité accrue chez les retraités, combinée à l’absence d’alternatives économiques crédibles, renforce la frustration sociale, nourrit les tensions et peut même aggraver les dynamiques de criminalité, de migration interne ou de radicalisation.
« Ce n’est donc pas simplement une réforme administrative. C’est une mesure à fort impact économique, social et politique, qui, en l’absence d’un cadre protecteur, déstabilise la société dans ses fondements les plus vulnérables », constate l’ODEP, avant de conclure : « Une réforme, même nécessaire, devient injuste lorsqu’elle écrase les plus vulnérables pour satisfaire des chiffres : une approche chère au FMI. Réformer, oui. Mais dans le respect de la souveraineté sociale, de la justice et de la dignité des citoyens. »
Bienvenu Ipan