Port sec de Kasumbalesa, Port en eaux profondes de Banana, Construction des aérogares de N’djili et de Luano, projet Inga 3, réhabilitation de la nationale numéro un, sont autant des grands projets engagés par la République mais pas toujours concrétisés.
Le président de la République a déclaré l’année 2020 « année de l’action » lors de son discours du 13 décembre 2019 au Congrès. Cette ambition politique était sans compter avec la grave crise sanitaire que le pays, comme le reste du monde, est en train de connaitre depuis le début de l’année.
La République démocratique du Congo est sérieusement frappée par la pandémie. Pays à une économie extravertie, le Congo Kinshasa voit ses recettes sensiblement baissées à la suite de la contraction et de la demande et de l’offre sur le marché international.
Pour preuve, le gouvernement ne rêve plus de réaliser les 11 milliards USD programmés dans son budget 2020. Cette loi de finances sera réduite de 35% au moins par un Collectif budgétaire en cours de préparation et devant être déposé au Parlement incessamment.
Autant dire que les ambitions du gouvernement, et par ricochet celles du président de la République, sont à revoir à la baisse en cette année. Alors que plus de 2 milliards USD étaient réservés pour financer des projets d’investissement en cette année, cette prévision budgétaire a non seulement été réduite au quart par le Plan de Trésorerie du premier trimestre du ministre des Finances mais pourrait davantage diminuer dans le Collectif budgétaire en attente.
Dès lors, l’on ne voit aucun grand chantier sortir des terres dans aucune des 26 provinces de la RDC. Les seuls chantiers en cours sont ceux du Programme de 100 jours plus particulièrement la construction des sauts-de-mouton dans la ville de Kinshasa que le gouvernement s’est engagé à finaliser le financement avant le 30 juin 2020. Pour autant, les 425 projets inscrits dans le Programme de 100 jours, pour une valeur de 492 millions USD, restent tous des pojets mineurs: sauts-de-mouton, les 4500 logements sociaux, acquisition de bacs, réhabilitation des ponts, la mise en état de praticabilité de certaines routes. Encore que le compte est loin d'être bon en ce qui concerne la mise en oeuvre du Programme de 100 jours.
Tous les grands projets notamment laissés par l’ancien régime, ou même promis par le chef de l’Etat, sont au point mort. Le Port sec de Kasumbalesa, dans la province du Haut-Katanga, d’un coût de 300 millions USD n’a connu aucun début. Le contrat signé le 11 mai 2018 à Lubumbashi par la RDC et la firme sud-africaine Rail and Road Africa (RRA) est tombé caduque pour « non-respect des clauses de ce contrat par la firme RRA ». Il appartient donc au gouvernement Congolais de le relancer soit avec le même partenaire sud-africain soit d’identifier un autre.
De même, le Port en eaux profondes de Banana n’a pas encore connu un début. Le Conseil des ministres du 5 juin a renvoyé l’examen de ce dossier à cette semaine. Le contrat signé en 2019 par la RDC et DP World reste en l’état. Il faut environ 1,3 milliards USD pour sa réalisation, selon le contrat signé avec la firme émiratie. Pourtant, la réalisation de ce port est un préalable à l’érection du Pont Route-Rail entre Kinshasa et Brazzaville. L’autre préalable de ce Pont Route-Rail est la construction du chemin de fer Kinshasa-Ilebo dans le cadre des projets intégrateurs sous régionaux.
Tout aussi, les deux grands projets de construction de la nouvelle aérogare de l’aéroport de N’djili pour 354,233 millions USD et celle de la Luano (Haut-Katanga) pour 201,131 millions attendent aussi leur validation par le gouvernement Congolais, car la RDC doit financer la contrepartie de ce projet avec les fonds Go-Pass. Ces deux projets bénéficient d’un prêt préférentiel d’Eximbank of China échelonné sur 20 ans.
L’autre grand projet en attente est celui du Grand Inga. Ici aussi, après les discussions des parties prenantes de mars 2020 à Kinshasa, il s’observe que le processus reste encore long pour parvenir à la signature d’un contrat de développement exclusif pour Inga 3. L’objectif principal des assises de Kinshasa, après celles d’Abidjan en décembre 2019 et janvier 2020 et celle de Johannesburg en novembre 2019, était de trouver de mécanisme de relance effective du Projet Inga 3.
Bien plus, Félix Tshisekedi, investi le 24 janvier 2019, ambitionnait de réaliser des grands projets dans les infrastructures et dans les autres secteurs agricole, de transport, etc. Il a même promis la création de 6 zones industrielles. Aucune n’est effectivement opérationnelle à ce jour alors que le pays risque une pénurie alimentaire suite aux effets de covid-19.
A tout prendre, le point faible de la RDC a toujours été la maigre mobilisation des recettes. Il faut une contrepartie sur chacun de ces contrats pour leur réalisation. Il se trouve que le gouvernement Congolais, au regard de la situation du Trésor public depuis le début de l’année, n’est pas en mesure de s’engager financièrement. Les maigres recettes perçues servent principalement au financement du fonctionnement des institutions de la République et aux rémunérations du personnel politique et des agents et fonctionnaires de l’Etat.
Dans un tel contexte d’exiguïté structurelle de mobilisation des recettes publiques, il est illusoire de penser aux investissements conséquents dans les grands travaux d’infrastructures et autres. Pourtant, la RDC en a énormément besoin pour son émergence économique.
Amédée Mwarabu