La tenue à Lubumbashi dans la province du Haut-Katanga, du 19 au 21 juin, de la 15ème édition de DRC Mining Week a juste été le moment de constater que la gouvernance du secteur des mines en République démocratique du Congo reste déficitaire.
Il s'en suit que ni la République démocratique du Congo, ni le peuple congolais encore moins les opérateurs miniers, personne n'est satisfait de la gouvernance du secteur minier. Ce, malgré la tenue chaque année des grandes conférences sur "Comment gérer de manière optimale les ressources minières de la RDC" .
La réalité reste que le secteur minier ne parvient à résorber la pauvreté encore moins à améliorer les conditions de vie des Congolais même de ceux qui vivent dans les zones minières. Cette réalité, couplée à d'autres notamment l'absence de transformation des minerais et la mauvaise gestion des revenus issus des mines, fait que le secteur des mines baigne dans le statu quo. Et les recommandations de la 15ème édition de DRC Mining Week le prouvent.
Pas d'avancées
En effet, les parties prenantes de lindustrie minière congolaise ont formulé plusieurs recommandations dont la mise en uvre devrait permettre lémergence du secteur extractif devant migrer vers la transformation. Ainsi, les recommandations concernent tous les acteurs du secteur des mines.
Sur la sous-traitance, la sonnette dalarme a été tirée sur lurgence pour cette catégorie dentrepreneurs congolais à se former davantage pour renforcer leurs capacités et se doter des compétences nécessaires pour accéder aux marchés plus importants.
En ce qui concerne lapplication du Code minier révisé, il a été recommandé à l'Etat de s'investir dans la vulgarisation de ce texte légal ainsi que de ses mesures dapplication pour une meilleure appropriation de ce document.
Du point de vue énergétique, les parties prenantes ont convenu de mettre un plan stratégique pour résorber ce déficit et booster la production ainsi que la transformation qui donne lieu à la création de la chaîne de valeur.
Aux entreprises minières, il leur a été recommandé le respect du cahier de charges des communautés affectées par les projets miniers et d'investir dans les recherches géologiques.
A lEtat congolais, il lui incombe lobligation de veiller à lapplication rigoureuses des lois régissant le secteur minier, de garantir un bon climat des affaires et dintensifier les dialogues permanent avec toutes les parties prenantes.
C'est quasiment les mêmes recommandations formulées à chaque conférence sur les mines.
Trois pistes pour repenser le modèle économique du secteur extractif
Dans son intervention la semaine passée à DRC Mining Week, Albert Yuma, président de la Fédération des entreprises du Congo (FEC), n'y est pas allé par le dos de la cuillère pour indexer le déficit structurel dans le secteur minier.
Ainsi, Albert Yuma Mulimbi qui est aussi président du conseil d'administration de la Gécamines, a-t-il identifié trois principes directeurs visant à repenser le modèle économique minier en RDC.
Au départ, il fait le constat selon lequel lindustrie minière, à lheure actuelle, est majoritairement extravertie et la part de la transformation locale est réduite à une portion congrue. Ce dont le secteur minier a besoin structurellement, selon lui, cest une évolution réelle de la façon dont lindustrie minière est organisée en RDC.
Ainsi, il a proposé trois principes essentiels: "Tout dabord, un modèle qui modifie les règles du partage de la ressource entre linvestisseur et le pays de linvestissement en alignant mieux leurs intérêts respectifs ;Ensuite un modèle qui favorise la valeur ajoutée locale ;Enfin, un modèle dans lequel la puissance publique joue réellement son rôle de gardienne de ses ressources stratégiques".
De son avis, c'est à ces trois principales conditions que le secteur minier "contribuera en profondeur à lémergence dun secteur privé développé où nationaux comme partenaires étrangers trouveront leur compte". "Lactivité appelle lactivité, et notre pays regorge encore de nombreuses opportunités de développement, dans les mines mais également, dans lénergie ou les transports par exemple, qui en sont une composante essentielle », a dit Albert Yuma.
Déficit criant de la mise en uvre du Plan stratégique de développement du secteur minier
Prévue pour 2016-2021, la mise en uvre du Plan Stratégique de Développement du Secteur Minier (PSDM) n'a pas connu un début de réalisation. Pourtant, sans son opérationnalisation, la RDC ne pourra pas rentabiliser l'exploitation de son secteur minier.
En effet, le gouvernement congolais, à travers le Ministère des Mines avait validé, depuis mars 2016, le PSDM pour le quinquennat 2016-2021. Dans le souci dassurer sa bonne mise en uvre, un Plan daction a même été élaboré. Ce dernier constitue le cadre de référence de toutes les interventions des acteurs au développement dans le secteur sur la période susmentionnée.
A travers ce Plan, le ministère des mines sest fixé des objectifs stratégiques suivants:Renforcer les capacités institutionnelles ;Intensifier les recherches géologiques et minières ; Développer une industrie minière compétitive pour un développement durable et la création demplois ; Promouvoir limage de la RDC en tant que lieu propice aux investisseurs miniers ; Soutenir une industrie minière favorisant un environnement durable.
Cependant, tous ces objectifs ne sont jamais atteints simplement parce que ce PSDM nest toujours pas opérationnel par manque de financement du gouvernement.
Les priorités du Plan stratégique
Le président Félix Tshisekedi tient à atteindre, au bout de son quinquennat, un budget cumulé de plus 80 milliards USD, selon le projet de société quil avait présenté lors de la campagne présidentielle. Dès lors, il simpose la nécessité de maximiser les revenus de lEtat dans tous les secteurs socio-économiques du pays.
Pour les mines, les actions prioritaires à mettre en uvre pour accroître les revenus issus de lexploitation minière sont, selon le PSDM: la Vulgarisation des textes légaux et réglementaires; la Certification des réserves; lopérationnalisation du Service Géologique National du Congo (SGNC); la Création et lopérationnalisation des écoles de gemmologie et de taillerie de diamant; la Création et lopérationnalisation dune banque des données du secteur de mines; lOpérationnalisation du fonds miniers pour les générations futures;la Relance du Centre de Retraitement des Minerais à Bukavu; lAcquisition de terrain et la construction dun immeuble de 12 étages devant abriter les services de lAdministration des Mines.
Les effets attendus de la mise en uvre de ces actions prioritaires sont : lAmélioration de la gouvernance du secteur ; la Maîtrise du niveau des réserves minières ; lÉmergence dune industrie métallurgique, sidérurgique pourvoyeuse demplois et meilleur encadrement de lexploitation artisanale ; lAmélioration du volume dinvestissements et de la transparence dans le secteur ; la Réduction des impacts négatifs sur lenvironnement.
Selon le PSDM, la vision du gouvernement dans le secteur des mines consiste à : « développer un secteur minier compétitif et durable, socle dun pays émergent et du bien être de la population congolaise ».
Amédée MK