Accord RDC-Rwanda sous médiation des États-Unis : Denis Mukwege s’oppose à toute cogestion des ressources naturelles avec un État agresseur sans justice et réparation

Denis mukwege
PAR Deskeco - 20 juin 2025 12:50, Dans Actualités

Dans une note de réflexion rendue publique sur ses réseaux sociaux et consultée ce vendredi 20 juin 2025 par Deskeco, le prix Nobel 2018, le Dr Denis Mukwege, rejette toute idée de cogérer les ressources naturelles avec le Rwanda, pays agresseur, sans engager au préalable des actions de justice et de réparation.

Il s'est, par ailleurs, opposé à toute intégration économique avec un État à la base du pillage « systématique » des ressources minières et de millions de morts. Le gynécologue congolais fait ainsi référence à la déclaration de principe ratifiée en avril dernier par la RDC et le Rwanda, un pas indispensable dans la médiation menée par les États-Unis et avec l'observation du Qatar.

« Envisager une intégration économique et une cogestion des ressources naturelles avec un État agresseur à la base du pillage systématique des ressources minières et de millions de morts sans parler de justice et de réparations est inconcevable pour la population congolaise en général et les communautés martyres de l'Est du Congo en particulier », dénonce-t-il. 
 

Il ajoute :

« La justice est non négociable et les richesses du sous-sol congolais ne peuvent être bradées de manière opaque dans le cadre d'une logique extractiviste néocoloniale. La paix ne peut se réduire à faire taire les armes, à obtenir un armistice et à faire du business car pour être juste et durable, elle ne peut faire l'économie de la justice, du respect des droits humains et du droit international ». 
 

Denis Mukwege appelle ainsi à « recourir à la justice transitionnelle pour prévenir la répétition des conflits et des violations graves des droits humains et du droit international humanitaire, et instaurer une paix durable en RDC ».

« La justice, la vérité et des réparations constituent des préconditions à la réconciliation et à la cohabitation pacifique au sein des pays des Grands Lacs africains. Aucun accord ne doit passer sous silence les massacres à grande échelle qu'a subi la population civile congolaise, les viols commis sur des centaines de milliers de femmes, et les déplacements forcés de millions de personnes », indique-t-il.
 

Il a, par ailleurs, émis des réserves «  face à l'approche bilatérale privilégiée par la diplomatie américaine face à une crise dont la dimension est largement régionale, avec la présence de diverses armées étrangères, dont celles de l'Ouganda et du Burundi, et entretenue par des intérêts géostratégiques qui touchent au fonctionnement de l'économie mondiale »
 

Dans ce contexte, il estime que « la conclusion d'un accord bilatéral n'aura donc pas vocation à consolider une paix durable ». Il exhorte ainsi les différentes parties prenantes à «privilégier une approche multilatérale, et à assortir les appels au cessez-le-feu et au retrait des forces d'occupation d'un calendrier ferme et de sanctions fortes et coordonnées en cas de non-respect persistant de la résolution 2773 du Conseil de sécurité ».

Il appelle Washington et d'autres acteurs impliqués à revitaliser l'Accord-cadre de 2013 pour la paix, la sécurité et la coopération, en vue de promouvoir la paix, la stabilité et la prospérité en RDC et dans la région des Grands Lacs, ainsi qu'à l'organisation d'une conférence internationale de haut niveau, avec la facilitation des institutions et des pays garants, en vue d'aboutir à une paix durable.

Jean-Baptiste Leni

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