La commission Économie et Finances (Ecofin) de l'Assemblée nationale soutient le plaidoyer du consortium Congo n'est pas à vendre (CNPAV) en faveur de la révision de l'avenant 5 à la convention Sicomines, en vue de mettre fin aux déséquilibres structurels et aux pertes en défaveur de la partie congolaise non résolus par la renégociation, ainsi qu'à l'incertitude sur le financement des infrastructures.
Des élus du peuple membres de cette commission projettent, pour ce faire, une rencontre avec les parties prenantes (CNPAV, ITIE, IGF et des experts) pour examiner ce plaidoyer et voir dans quelle mesure réviser ou abroger cet avenant pour les intérêts de la République démocratique du Congo. C'est ce qui ressort du forum de haut niveau organisé le vendredi 9 mai 2025 à l'hôtel du Fleuve Congo, à Kinshasa. Guy Mafuta et Patrice Kitebi, respectivement président et premier vice-président de l'Ecofin, ont conduit la délégation de ces députés.
Réviser ou abroger
Intervenant en tant que citoyen congolais et mandataire en mines, le président de la commission Ecofin de l'Assemblée nationale a dénoncé « le montage financier » du projet Sicomines où la RDC ne fait que « subir ». Pour lui, « Tout le montage financier a été fait par la partie chinoise ».
Le député Guy Mafuta Kabongo a, dans ce contexte, rassuré : « Après analyse, nous allons prendre l'option de réviser ou d'abroger cet avenant ».
Quant à lui, le premier vice-président de l'Ecofin, Patrice Kitebi, a estimé que « Le moment est venu pour que l'Assemblée nationale prenne cette question en main, c'est important pour que le Parlement dans son ensemble soit informé (...) ».
Abordant dans le même sens que ses prédécesseurs, le député Jean-Pierre Pasi za Pamba estime qu'il y a beaucoup de zones d'ombre dans ce contrat. D'où sa recommandation au CNPAV de mettre à la portée de la commission Ecofin toutes les informations sur ce contrat pour tabler là-dessus.
Même son de cloche avec le député Dedhe Mopasa de la commission Environnement de l'Assemblée nationale, qui propose de faire des recommandations au Parlement chinois sur la révision de cet avenant 5 à la convention Sicomines.
Quant à lui, le député Jules Mugiraneza a sollicité tous les documents informatifs sur cette convention pour une sensibilisation à l'Assemblée nationale. Ce qui évitera à la RDC ce genre d'erreur à l'avenir.
Répondre aux intérêts du peuple congolais
La coalition réaffirme son engagement en faveur d'une renégociation équitable du contrat Sicomines, « qui doit répondre aux intérêts à court et à long terme du peuple congolais et garantir un avenir économique plus juste pour la RDC ». Au cours de ce forum de haut niveau, le CNPAV a expliqué clairement aux élus du peuple et aux autres membres de la société civile les déséquilibres de l'avenant 5 à la convention sinocongolaise un an après sa signature.
« Cet avenant, censé rendre l'accord plus avantageux pour la République démocratique du Congo, a en réalité entraîné un manque à gagner considérable pour le pays et n'a pas permis d'améliorer l'exécution de la convention ».
Dans son calcul fait conformément au niveau du système convenu dans l'avenant 5, le CNPAV démontre que « la nouvelle façon de calculer les décaissements pour les infrastructures a déjà fait perdre à l'État congolais une somme totale de 132 millions USD en 2024 ».
Le CNPAV, qui cite des sources officielles, révèle que la Sicomines n'a payé que près de 822 millions USD pendant 15 ans au titre de financement des infrastructures, alors qu'en réalité ceux-ci sont des prêts à rembourser avec des intérêts.
Ces montants, poursuit la coalition, ne représentent qu'une moyenne annuelle de 54 millions USD. Or, la moyenne annuelle des paiements classiques des projets de la même taille que Sicomines, en l'occurrence Tenke Fungurume Mining (TFM), Kamoa Copper Company (KCC) et les autres, est d'environ 400 millions USD, soit huit fois plus que la fourniture des infrastructures.
Faiblesses de l'avenant 5 à la Sicomines
« Selon les clauses de l'avenant 5, la partie RDC n'aura accès aux 324 millions USD par an pour financer les infrastructures que si le cours du cuivre sur le marché mondial est supérieur ou égal à 8 000 USD la tonne. La RDC recevra moins, et ne recevra rien du tout lorsque les cours du cuivre sont en deçà de 5 200 USD la tonne. Les paiements de la Sicomines ne dépendront pas du nombre de tonnes de cuivre exportées, sauf si le cours du cuivre moyen annuel dépasse 12 000 USD la tonne, ce qui n'est jamais arrivé dans l'histoire de l'exploitation du cuivre jusque-là », note le CNPAV.
À en croire le CNPAV, « ceci signifie que si la Sicomines exporte et vend 100 000 tonnes, 200 000 tonnes ou 400 000 tonnes, elle paiera toujours le même montant ne dépassant pas 324 millions USD ».
Le CNPAV estime « inacceptable que, suite à une renégociation visant à rendre la convention plus favorable pour la RDC, le pays subisse une telle perte, surtout en considérant la nécessité d'améliorer ses infrastructures ».
Le CNPAV a aussi présenté certaines faiblesses de cet avenant, à savoir :
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la reconduction des exonérations fiscales au profit de la Sicomines, qui prive l'État congolais de recettes essentielles ;
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la persistance d'une gouvernance hors circuit normal du fonctionnement de l'État ;
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un bilan globalement décevant après 16 ans d'application de la convention Sicomines ;
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un nouveau système de calcul du coût de financement des infrastructures, basé a priori sur le cours du cuivre au niveau international, qui engendre de nouvelles pertes pour la RDC.
Bienvenu Ipan