En prônant le développement endogène de la RDC, le professeur Florimond Muteba : « Cette voie exige que notre société reste elle-même, qu’elle puise ses forces dans sa culture et dans les formes de pensées et d’action qui lui sont propres (…) »

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Florimond Muteba, PCA de l'ODEP.
PAR Deskeco - 27 sep 2024 15:56, Dans Actualités

Écrivain, enseignant et chercheur, le professeur Florimond Muteba, Président du Conseil d’Administration de l’Observatoire de la dépense publique (ODEP) et Directeur général du Centre d’études et de gestion du développement en Afrique (CEDA) vient de publier chez Médiaspaul, à Kinshasa, le livre intitulé « Un avenir pour la République démocratique du Congo ».

 Dans ce livre de 188 pages baptisé le jeudi 26 septembre 2024 par Me Jean-Claude Katende dans la salle de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), dans la commune de la Gombe, l’auteur donne, dans le chapitre III sur les axes principaux d’une nouvelle politique économique globale en RDC, des orientations à suivre. Il recommande d’opter pour une voie de développement endogène.

 À l’en croire, « Cette voie exige que notre société reste elle-même, qu’elle puise ses forces dans sa culture et dans les formes de pensées et d’action qui lui sont propres, afin que notre développement devienne une réalité de transformation permanente de notre système social ». Cet expert explique son choix : « opter pour un développement endogène, c’est faire en sorte que celui-ci réponde à des valeurs communes, à une inspiration cohérente, à des espoirs et des besoins partagés, où se reconnaît l’ensemble de la collectivité nationale, et qu’il puisse mobiliser ses volontés, ses énergies, ses imaginations rassemblées. C’est au regard de cette exigence que nous pourrons envisager le processus de modernisation et la maîtrise du savoir et du savoir-faire modernes ».

 Les grandes orientations

Pour le professeur Florimond Muteba, « ce développement n’aura de sens que s’il renforce et fortifie la créativité sociale ; il ne pourra réussir que s’il est assumé par des populations pleinement conscientes de sa nécessité, aptes à agir et décidées à le faire. Cela veut dire qu’il faudra parier sur l’homme et ses possibilités, lui donner des raisons de vouloir aller de l’avant, de moduler les innovations technologiques, sociales, politiques, culturelles de sorte qu’elles soient à chaque étape, assumées par la population elle-même et vécue, par elle comme un dépassement créateur et bénéfique ». 

Ici, précise l’écrivain, « on est bien loin des modèles qui ont inspiré notre construction économique actuelle qui a plutôt marginalisé à tout point de vue la population. Toutes les réformes à envisager dans chaque secteur doivent répondre aux exigences de cette voie de développement ». 

Le développement endogène, d’après le PCA de l’ODEP, « n’est possible que si l’on en fait un projet politique et que des hommes se battent et meurent pour cette option, sans laquelle il n’y aura point d’avenir chez nous. Ce choix hautement politique, est la voie de la révolution économique et politique, la seule qui puisse sauvegarder notre démocratie qui est en voie de construction pour de nombreuses années ».

 Le professeur Muteba insiste sur cette volonté politique qui est opposable à la récupération qui a été faite de ce thème par des organisations internationales et des pouvoirs politiques au nord comme au sud, qui auraient tout à perdre de ce choix en faveur d’un développement qui ne peut être que bénéfique aux masses populaires.

 Les principaux axes d’une nouvelle politique agricole

L’auteur Florimond Muteba indique les directions dans lesquelles il faudra agir sur l’ordre mondial afin de favoriser la réalisation des objectifs du développement endogène de la RDC. Pour lui, (1) ce développement est avant tout populaire, donc national ; (2) L’industrie doit être mise au service de la productivité agricole ; (3) Il faut abandonner la production de luxe pour le marché local à l’exportation fondée sur la reproduction d’une force de travail bon marché (mieux servir les masses urbaines) ; (4) N’ayant pas réalisé une révolution agraire préalable à la révolution industrielle, nous devons renverser la valeur, c’est-à-dire que nous devrons articuler un secteur moderne de l’industrie rénovée dans ses orientations de base, au secteur des petites industries rurales qui permettent de mobiliser directement les forces latentes de progrès ; (5) Seule une révolution dans le secteur agricole pourra financer une industrialisation saine, dégager un surplus vivrier capable d’assurer l’indépendance nationale ; (6) L’industrie doit être mise au service de masses urbaines et rurales pauvres et cesser d’être guidée par la logique financière qui favorise le marché local privilégié et l’exportation vers le centre ; (7) Les emprunts éventuels à la technologie dont des modèles nouveaux devront être imaginés seront fait en fonction de besoins internes du développement populaire ; (8) Le développement endogène, même s’il exige de compter d’abord sur ses propres forces, n’a rien à voir avec l’autarcie. Le pays se doit de recourir à l’importation des inputs nécessaires à l’accélération de son développement (équipement, énergie, certaines matières premières). Les échanges avec occidentaux restent nécessaires mais doivent être qualitatifs ; (9) Il va falloir développer l’autonomie collective avec les pays africains en agissant dans deux directions : 1) l’entraide mutuelle (échange des matières premières, en évitant plusieurs intermédiaires) ; 2) contrôle national de l’exploitation de ressources naturelles. Les exportations doivent être réduites au niveau des importations exigées par la stratégie interne du développement endogène.

La nouvelle politique industrielle globale

Le professeur Florimond Muteba, qui propose les principaux axes d’une nouvelle politique agricole, considère que le développement endogène devra se tourner d’abord vers les campagnes et les populations pauvres qui y vivent.

 Il s’agit, selon lui, d’un choix politique volontaire qui comprend six volets à savoir appuyer les structures paysannes ; la mise en avant d’une autre logique technologique ; la reconquête des marchés urbains ; la révision de la structure des prix et la délimitation d’un cadre régional d’échange ; la mobilisation de l’épargne et la régulation des stocks alimentaires ; l’intégration des filières de production. 

 En ce qui concerne la stratégie d’industrialisation que l’auteur préconise, trois thèmes centraux sont à retenir, à savoir l’attaquer directement et sans préalable à la modification des relations économiques avec l’extérieur (sortir les TIC de la dépendance) ; l’engagement dans de nouveaux rapports sociaux internes (réorientation de l’allocation du surplus au profit des producteurs) ; la préservation de l’écosystème (en s’appropriant la technologie). Pour ce faire, l’écrivain Florimond Muteba invite à : 1. Reconsidérer toutes les formes de la dépendance. Il souligne, à cet effet, la nécessité à la fois de la régulation de nos exportations sur le niveau des importations pour la réalisation de la stratégie et de la définition des seuils d’ouverture sur l’extérieur sur la base d’une stricte appréciation de besoins internes prioritaires pour briser le cycle infernal de l’endettement ; 2. En deuxième lieu, l’écrivain propose une stratégie autocentrée consécutive à cette vaste remise en question : réorganiser l’agriculture vivrière, avec le double but d’améliorer d’abord les conditions de vie de la paysannerie pauvre, puis, au fur et à mesure de la hausse de la productivité, enfin de fournir un surplus agricole croissant destiné à la ville pour assurer l’autosuffisance alimentaire ; le développement de l’industrie tournée vers le marché interne et mis en particulier au service de l’agriculture (fourniture de biens permettant d’élever la productivité et la transformation locale des produits alimentaires ) et de la satisfaction des besoins de hase (habitat, santé, énergie…) ; de grandes unités manufacturières et modernes restent indispensables dans les branches à fortes économies d’échelle (projets à étudier et apprécier rigoureusement). Mais elles doivent coexister avec des micro-unités décentralisées, insérées dans le milieu rural, afin notamment d’assurer l’articulation étroite entre travail agricole et travail industriel. 

Bienvenu Ipan

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