Dans le souci de promouvoir la transparence, l’obligation de rendre de compte, la sincérité dans la gestion des fonds alloués aux opérations électorales, le Centre de recherche en finances publiques et développement local (CREFDL) a, avec l’appui de l’ONG allemande Democracy Reporting International (DRI), mené une étude sur les fonds alloués aux opérations électorales de 2016-2019 et 2021-2024 en RDC. Une activité qui s’inscrit dans le cadre du programme « Unis pour la démocratie », financé par l'Union européenne et la République fédérale d’Allemagne.
Dans le rapport préliminaire de cette étude parvenu ce vendredi 12 janvier 2024 à DESKECO.COM, le CREFDL, après constats et analyses, dénonce : « la gestion du budget alloué aux opérations électorales est caractérisée par l’opacité, l’absence de crédibilité et de sincérité des chiffres présentés par son Bureau ».
Le CREFDL présente comme suit la gestion du budget de la CENI alloué aux opérations électorales de 2016-2019 et 2021-2024 : « hausse de 25,1% des dépenses de la CENI contrairement au cycle électoral précédant. De décembre 2021 à novembre 2023, le gouvernement a effectué un versement de 1 091 479 898 USD à la CENI pour financer les opérations électorales contre une demande 1,1 milliard USD. Comparés aux budgets votés de 711 millions USD, il se dégage un taux d’exécution de 153%, en dépassement de 53,31%. De son côté, la CENI a déclaré de n’avoir reçu que 930 millions USD ; au cycle 2016-2017, la CENI a reçu 817,4 millions USD. Mais, les montants retracés au niveau de la chaîne de la dépense est de 706,3 millions USD. Ces opérations ont dégagé un dépassement de 111,1 millions USD que la comptabilité publique n’a pas encore retracés. Ceci démontre que les coûts des opérations électorales en cours sont très élevés ; recours fréquent à la procédure d’exception et obscures pour financer les élections, en violation de la loi ; depuis l’entrée en fonction du nouveau bureau de la CENI, en novembre 2021, les dépenses de plus de 800 millions USD n’ont jamais été régularisées par le ministère du Budget, faute de réception des avis de débit de paiement dans le circuit budgétaire. Auparavant, soit 2016-2019, un montant de 674,7 millions USD n’a jamais été justifié, d’après la DGPP ; des nombreux flux financiers sont souvent dans des banques commerciales en lieu et place de la Banque centrale du Congo, échappant au contrôle interne. Cette pratique est susceptible de favoriser le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, et surchauffer le marché de change et entrainer l’inflation ; les effectifs du personnel permanent de la CENI sont passés de 1.369 en 2020 sous la présidence de Corneille Nangaa à 3 240 en 2022, après l’entrée en fonction de l’actuel bureau, soit une augmentation de 1871 agents (57,7%). En outre, les effectifs non reconnus par le Trésor public et sur les listes de paie sont évalués à 117 agents, mais rémunérés par la CENI ».
Pour les opérations des dépenses des marchés publics, le CREFDL note : « 80% effectués avec les fournisseurs locaux ne figurent pas dans les PPM et n’ont reçu aucune autorisation de la DGCMP ; l’absence d’émission et de publication des Avis d’appel d’offre sur le site de l’ARMP, moins encore les décisions d’attribution desdits marchés ; saucissonnage des marchés pour échapper à la procédure d’appel d’offres. C’est le cas de l’achat des produits pétroliers, dont le gasoil, l’essence et le lubrifiant. La CENI a déclaré un paiement de 272.945,14 USD en 2022 à ses fournisseurs, alors que le coût total du marché s’élève à 3 900 354 USD. Ce contournement de la procédure creuse un écart non déclaré de 3 627 408,86 USD ; 83,71% d’entrepôts loués par la CENI appartiennent aux privés. De quoi susciter l’inquiétude des acteurs engagés au processus électoral ».
Au regard de tout ce qui précède, le CREFDL formule quelques recommandations pour améliorer la gestion des fonds alloués aux opérations électorales. Il s’agit entre autres de : « la suppression des dépenses des opérations électorales comme étant exceptionnelle (Fonds spécial d’intervention) ; l’intégration du budget de la CENI dans une programmation pluriannuelle ; la tenue d’un débat public au Parlement ; le renforcement du contrôle tant interne qu’externe ; la publication trimestrielle des rapports dépenses détaillées de la CENI ».
Bienvenu Ipan