La situation de la Société Minière de Bakwanga (MIBA), dans la province du Kasaï-Oriental, continue à inquiéter. Selon les derniers chiffres publiés par la Cellule technique de coordination et de planification minière (CTCPM), un service du ministère congolais des mines, cette entreprise n'a produit aucun carat de diamant au cours du deuxième trimestre de 2024, soit entre avril et juin.
Par conséquent, Sacim (Société Anhui Congo d'investissement), une autre entreprise de production de diamant dans la même contrée, en a fait plus. Elle a produit plus de 873 000 carats durant la même période, soit près de 98% de la production industrielle, selon le ministère des mines.
Interrogé par ACTUALITE.CD, le Directeur général de la MIBA, André Kabanda Kana, a attribué cette situation à l'arrêt prolongé des activités de l'entreprise et à ses difficultés financières.
« La MIBA est en faillite. C’est pourquoi on parle souvent de la relance. On se débrouille vaille que vaille pour faire tourner la société en attendant le financement de l’Etat. Mon souhait le plus ardent est que la MIBA soit relancée », a-t-il indiqué.
Cependant, un syndicaliste contacté évoque les responsabilités de la direction de la MIBA, mettant en cause un manque de leadership et l'absence de mécanismes de production efficaces.
Claude Claude Mianzuila, classificateur, évaluateur des diamants et ancien consultant à la MIBA parle quant à lui du problème récurrent du vol de diamants au sein de l'entreprise, pratique qu’il a dénoncée, encore consultant à la MIBA.
Selon lui, ces vols ont un impact négatif sur les finances de la MIBA et sur la vie des populations locales, qui dépendent en grande partie de l'activité minière. La conséquence est que, la grande partie de la population, essentiellement les jeunes, quitte la province pour d’autres grandes villes du pays, dont Lubumbashi et Kinshasa.
Défi de la relance de la MIBA
Selon le document 8 relatif à la déclaration sur les risques budgétaires dans le projet de loi de finances 2025 sous examen au parlement, la MIBA est parmi les entreprises publiques en état de faillite non déclarée, au même titre que la CADECO, les LMC, la SOKIMO, etc. Selon le ministère du budget, les capitaux propres de ces entreprises sont tombés en dessous de 50 % requis par l'OHADA.
Cependant, lors de la réunion du conseil des ministres du 23 août dernier, le gouvernement congolais avait adopté un plan de relance de la MIBA, estimé à 70 millions de dollars américains.
Ce plan se décline en cinq axes prioritaires à savoir la certification des réserves minières, la sécurité des concessions, les investissements liés à la production, les charges du personnel et suivi-évaluation, ainsi que les autres investissements.
L’entreprise prévoit une montée en puissance significative à partir de 2026, avec une production annuelle estimée à 2.438.484 carats et un chiffre d’affaires de 58.953.725 dollars américains
Difficile de croire en l’atteinte de cet objectif, dans la mesure où le gouvernement n’a toujours pas honoré ses engagements jusqu’à ce jour, indique le DG de la MIBA.
Mettre les personnes qu’il faut à la place qu’il faut
Mais pour Claude Claude Mianzuila, il faut bien plus que de l’argent pour relancer la MIBA. Il faut par contre commencer par résoudre en priorité les problèmes fondamentaux de l'entreprise. Il plaide pour une réforme tant au niveau administratif, financier que technique, et appelle à une meilleure gestion des ressources humaines.
«Il faut mettre les hommes qu’il faut à la place qu’il faut, plutôt que de mettre des politiciens non techniciens, comme pour récompenser leur combat et leur loyauté politique », a-t-il indiqué.
Selon le document 8 relatif à la déclaration sur les risques budgétaires dans le projet de loi de finances 2025, la situation des entreprises en faillite comme la MIBA entraine la baisse des recettes non fiscales et fiscales, et peut impacter négativement l’exécution du budget.
Ces entreprises sont soumises aux paiements de droits et taxes, dont la redevance minière et la taxe d’implantation. Or, avec leur activité quasi nulle, elles ne pourront pas s'acquitter de ces obligations, ce qui impacterait directement les recettes non fiscales de l'État.
Pour faire face à cette situation, le gouvernement congolais envisage notamment renforcer le contrôle, le suivi et l’audit externe des entreprises publiques et améliorer la qualité de la gouvernance, du mode de désignation des mandataires.
Bruno Nsaka