Depuis leur création en 1944, le Groupe de la Banque mondiale (GBM) et le Fonds monétaire international (FMI) ont façonné les contours de l’économie mondiale. Alors que j’ai appelé à une réévaluation du rôle du FMI, il est impératif d’entreprendre une réévaluation parallèle du mandat de la Banque mondiale et de son orientation opérationnelle.
Dans sa forme actuelle, guidée par les principes du « Consensus de Washington », le GBM a défendu la déréglementation, la privatisation, la libéralisation du commerce et la croissance économique à travers les Programmes d’ajustement structurel (PAS). Pourtant, les effets néfastes persistants de ces politiques sont trop évidents, et les preuves limitées de leurs bienfaits supposés soulèvent de sérieuses questions quant à l’efficacité et à la pertinence des institutions de Bretton Woods.
À ce moment charnière, alors que la Chine offre de nouvelles perspectives au Sud global, nous nous trouvons devant une occasion rare de redéfinir le rôle et la mission du GBM. Ce moment appelle à un réalignement de leurs efforts sur les crises environnementales urgentes et la quête évolutive de justice économique.
Le Dilemme de la Dette Mondiale : Un Paradoxe de Croissance
Les nations développées comme les États-Unis, la France et le Japon, désormais rejointes par la Chine, se trouvent prises dans une spirale de dettes inéluctable, alimentée par des dépenses excessives pour le bien-être social et la croissance économique. Leur quête inlassable de niveaux de vie élevés et de domination mondiale est exacerbée par le vieillissement de la population et l’explosion des coûts des pensions et des soins de santé.
Ces nations font face à un défi redoutable pour gérer leur dette, avec des solutions viables qui semblent évasives et la menace de troubles sociaux toujours présente. En revanche, les pays plus pauvres souffrent de ce déséquilibre mondial, faisant face à des critiques injustes tout en manquant du soutien économique et des opportunités offertes à leurs homologues plus riches.
S’attaquer à ces inégalités économiques exige une approche audacieuse et innovante.
La Véritable Voie à Suivre
Une approche plus prometteuse pourrait résider dans la réduction de la dette mondiale grâce à des initiatives telles que l’allègement de la dette pour les Nations Très Endettées (NTE), ce qui pourrait alléger les fardeaux de la dette et promouvoir l’inclusivité.
Deux stratégies potentielles sont :
1. Allocation de Crédit Centrée sur les Nations : Distribuer un trillion de dollars à chaque nation, quelle que soit sa taille ou son statut économique.
2. Distribution de Crédit par Capita : Allouer dix mille dollars à chaque individu dans le monde, avec un crédit au compte national de chaque pays basé sur sa population.
Ces approches offrent une alternative pratique aux réparations traditionnelles et aux Droits de Tirage Spéciaux (DTS) du FMI, visant à réduire la dette et à favoriser la stabilité économique mondiale et l’inclusivité.
Allouer les Fonds avec Intégrité
Les dettes externes devraient prendre la priorité sur les obligations internes afin de respecter les engagements internationaux et préserver l’intégrité économique.
Si le solde financier d’une nation est favorable, les fonds excédentaires devraient être alloués comme suit : 25 % pour les infrastructures, 25 % pour les programmes sociaux, et 50 % pour élever le salaire minimum universel à 2 $ de l’heure. Cette allocation, supervisée par la législature nationale, devrait être mise en œuvre sur cinq ans pour assurer transparence et équité.
Le Nouveau Rôle et la Nouvelle Mission du FMI
La fonction principale du FMI doit évoluer vers une surveillance vigilante, englobant le suivi minutieux des soldes des comptes nationaux, la facilitation des paiements de la dette extérieure et la gestion des obligations financières internes. Sa mission deviendra une tapisserie de supervision complète, garantissant que chaque nation s’aligne sur ces principes fondamentaux.
Le Nouveau Rôle et la Nouvelle Mission de la Banque Mondiale
Le Groupe de la Banque mondiale (GBM) devrait suspendre temporairement ses prêts directs aux projets de développement pour se recentrer sur la fourniture d’un soutien budgétaire crucial aux gouvernements par le biais du Financement des Politiques de Développement (FPD). Ce changement s’aligne sur sa mission profonde d’éradiquer l’extrême pauvreté d’ici 2030 et de promouvoir la prospérité partagée, soulignant son engagement à s’attaquer aux problèmes profonds d’inégalité et de sous-développement.
Dans ce contexte, les Nations Très Endettées (NTE) joueront un rôle clé dans le financement de la transition des pays en développement vers des énergies durables. En adoptant des technologies plus propres et en réduisant la dépendance aux combustibles fossiles, ces nations seront à l’avant-garde de la protection de l’environnement et accéléreront le développement des énergies renouvelables. Ce changement transformateur est essentiel non seulement pour atténuer le réchauffement climatique mais aussi pour éviter les crises environnementales imminentes dans les régions en forte croissance.
Ainsi, le GBM doit se concentrer sur le renforcement du commerce international et la promotion d’une croissance économique durable, en puisant dans son vaste réservoir d’expertise en développement.
Bénéfices Universels
Réduire la dette dans les pays très endettés allégera la pression sur les programmes sociaux et les taxes. Les nations moins endettées pourront utiliser les fonds excédentaires pour améliorer les conditions socio-économiques et prévenir les troubles. Les pays les moins développés se concentreront sur une modernisation rapide, bénéficiant de l’expertise avancée.
Les économies avancées connaîtront une croissance de la production et des investissements, tandis que le soutien aux Nations Très Endettées (NTE) stimulera la création d’emplois à l’échelle mondiale et réduira la migration due à la pauvreté. Malgré les risques potentiels de mauvaise utilisation, les niveaux de vie s’amélioreront globalement, contribuant à réduire la pauvreté mondiale.
Cependant, il incombe aux gouvernements du tiers-monde, comme celui de la RDC, de saisir l’opportunité de cette initiative, de se joindre à ma campagne et de s’engager dans la même direction avec force.
Jo M. Sekimonyo
Écrivain, théoricien, défenseur des droits de l’Homme et économiste politique
