Face aux malversations entourant la gestion des fonds publics ou les ressources minières des pays africains les juridictions locales restent souvent assez frileuses. Les tribunaux internationaux demeurent donc le meilleur recours pour obtenir justice.
En RDC, un nouveau scandale financier dans le secteur minier est en gestation depuis 2014 entre les tribunaux suisse et britannique. C’est ce qu’on peut comprendre à la lecture d’un arrêt du tribunal pénal fédéral suisse daté du 30 mars dernier et publié récemment sur le site web de l’institution. Le document révèle des actes de corruption entachant l’octroi et la conservation de certains actifs miniers congolais.
Dans le cadre de soupçons de corruption au cours de trois opérations d’acquisition de projets miniers congolais, l’unité de lutte contre les fraudes (SFO) du Royaume-Uni a sollicité en 2014 l’aide des autorités suisses. L’objectif étant d’obtenir la mise sous séquestre et la transmission de divers documents concernant notamment certains comptes bancaires suspects, afin d’en identifier les propriétaires.
Les enquêteurs britanniques ont effet mis en avant des preuves de transfert de fonds vers les comptes en question, représentant des remboursements de sommes en liquides prêtées en RDC à une société dénommée K. Ltd (enregistrée à Gibraltar). « Cette société en RDC ne savait pas nécessairement ce que C. faisait de cet argent liquide […]. C. remboursait ensuite ces sociétés par des transferts bancaires, en recourant à un cabinet d’avocats du nom de I. basé à Gibraltar et des comptes en Suisse », indique la décision, qui ajoute que ce système permettait d’échapper au contrôle des autorités congolaises.
C, considéré comme un homme d’affaires proche du gouvernement défunt, a utilisé ces sommes obtenues en liquide pour effectuer des paiements au profit d’un député (L) qu’il décrit comme le « bras droit » de Joseph Kabila. Ces paiements, qui s’apparentent vraisemblablement à de la corruption, ont permis de garantir « la poursuite [en RDC] des activités », grâce à la « bonne volonté et l’influence » du député L.
En dehors de l’ancien président Joseph Kabila, qui a logiquement pu être identifié dans cette affaire, notons que les identités du reste des protagonistes restent incertaines. L’enquête n’est certes pas terminée, mais elle devrait encourager le nouveau président Félix Tshisekedi à poursuivre l’assainissement du secteur extractif congolais.
Rappelons que l’arrêt du tribunal fédéral suisse a rejeté le recours d’une banque dénommée A. Ltd qui demandait à la Cour de l’autoriser à ne pas remettre les documents réclamés par les autorités britanniques.
Jordan MAYENIKINI / Agence Ecofin