Sauts-de-mouton de Kinshasa: Guerre des chiffres, soupçons de détournement, attaques politiques (Décryptage)

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PAR Deskeco - 10 fév 2020 07:58, Dans Actualités

La polémique commençait a enflé sur le retard pris dans l’exécution du Programme d’urgence de 100 premiers jours du président de la République notamment sur son volet sauts-de-mouton à Kinshasa.

Finalement, la réunion interministérielle convoquée par le Premier ministre, Sylvestre Ilunga, le samedi 8 février a eu le mérite de faire le point sur la situation de ces travaux.

Toutes les parties prenantes dans l’exécution de ces travaux étaient à cette réunion : le Vice-premier ministre du Budget, Mayo Mambeke, le VPM des ITPR, Willy Ngoopos, le Vice-Ministre des Finances, Junior Mata, le Directeur de Cabinet Adjoint du Ministre d'État à l'Urbanisme et Habitat, le Gouverneur de la Banque Centrale du Congo, le DG de l'Office des Routes et le DG de l'Office des Voiries et Drainage.

Fin des travaux le 30 juin

De cette réunion, le gouvernement a pris l’engagement de terminer les travaux des sauts-de-mouton avant le 30 juin 2020, jour de commémoration de 60 ans d’anniversaire de l’indépendance de la République démocratique du Congo.

"Nous demandons à la population kinoise de prendre son mal en patience. Si les sauts-de-mouton n'ont pas évolué, c'est parce que les finances étaient un peu difficile à gérer. Nous prenons l'engagement de fêter le 30 juin avec les sauts-de-mouton de Kinshasa en place. Lors du 60ème anniversaire de notre indépendance, nous voulons que nos invités trouvent des infrastructures dignes de notre capitale", a déclaré Baudoin Mayo Mambeke, le vice-premier ministre en charge du Budget à l’issue de la réunion.

Mea culpa du gouvernement sur le retard du financement

De cette réunion, l’on note aussi que le gouvernement est le premier coupable dans le retard dû à l’exécution des travaux.  C'est sans langue de bois que le gouvernement a fait son mea culpa, reconnaissant que « si les sauts-de-mouton n'ont pas évolué, c'est parce que les finances étaient un peu difficile à gérer ».

D’où cet engagement de l’exécutif national de libérer désormais le reliquat pour permettre la fin des travaux dans le délai sus évoqué.

 "Le gouvernement nous rassure 3,5 millions de dollars, dont 1,5 millions pour l'OVD et 2 millions pour l'Office de Routes. La semaine qui suivra, nous allons faire un décaissement presque d'autant pour terminer les besoins financiers de ces deux régies jusqu'à atteindre 13,5 millions de dollars d'ici Mai...", a ajouté Baudoin Mayo Mambeke, faisant le compte rendu de la réunion.

Il n'y a plus donc à chercher des boucs émissiares. Les travaux se sont arrêtés suite au manque de financement.

La guerre des chiffres

Tout aussi, cette séance de travail a pu communiquer les chiffres tant sur le financement décaissé que sur le niveau d’exécution des travaux. Selon Baudoin Mayo Mambeke, la construction des sauts-de-mouton se chiffrait à 46 millions USD, le niveau d’exécution des travaux est de 55% et celui de décaissement des fonds est à 56%. Et le solde pour terminer les travaux s'évalue, à ce jour, à plus ou moins 13 millions USD.

Ici, deux semaines avant, plusieurs chiffres circulaient. Pour le ministre des Finances, Sele Yalaghuli, les travaux des sauts-de-mouton sont exécutés à  moins de 50% ; pour les cadres de l’UDPS qui ont eu à faire la ronde de chantiers à 30% ; alors que le directeur du cabinet du président, Vital Kamerhe, tablait sur 70%.

Les soupçons de l’UDPS

C’est à peine à des termes non voilés que Jean Marc Kabund a indexé le directeur de cabinet du chef de l’Etat dans le retard pris dans ces travaux.

« Nous avons fini l’inspection dans tous les sites où il y a des projets notamment le projet de 100 jours du chef de l’Etat, nous avons fait la ronde de tout Kinshasa. Nous avons visité tous les sauts-de mouton, nous nous sommes rendus sur le site universitaire, nous avons rendu visite dans des quartiers où nous avons trouvé les montagnes des immondices, des saletés. C’est pour cela nous disons, les jours passés nous avons entendu quelqu’un dire à la radio que les travaux de 100 jours sont déjà réalisés à la hauteur de 70% (Ndlr: C'est Vital Kamerhe qui l'a déclaré sur une radio de la place quelques jours plutôt). De là où nous venons, ce projet-là n’est même à 30% en termes de réalisation », a dit Jean Marc Kabund, président ai. de l’UDPS alors qui conduisait la visite des chantiers le jeudi 6 février, rapporte ACTUALITE.CD.

Cette attaque contre un allié politique cache mal le climat de soupçon  qui règne au sein de CACH (Cap pour le changement), la plateforme où l’UDPS du président Félix Tshisekedi est allié à l’UNC de Vital  Kamerhe, du reste directeur de cabinet du chef de l’Etat.

Notons que c’est dépuis novembre 2019 que le gouvernement gère le Programme de 100 jours y compris les projets de sauts-de-mouton, soit juste au moment où l’on commençait à observer l’arrêt des travaux dans les différents chantiers des sauts-de-mouton.

« C’est depuis novembre qu’on n’a pas la coordination de ce programme. Le programme des 100 jours qui n’est qu’une façon de montrer la voie à suivre n’avait pas la prétention de résoudre tous les problèmes d’infrastructures du pays », soulignait dans une émission sur Radio Okapi Nicolas Kazadi, ambassadeur itinérant du président de la République et ancien coordonnateur de ce projet, pour dire que c'est à l'exécutif que révient la charge du suivi de ce programme désormais.

Un audit programmé

C’est dans ce contexte de guerre des chiffres, soupçons de détournement et même des attaques contre un allié politique que le président de la République, dans sa communication lors du Conseil des ministres du 7 février, a décidé de l’envoi d’un audit sur l’utilisation des fonds débloqués pour la construction de ces ouvrages.

Cet audit devrait déterminer les responsabilités des entreprises qui n’ont pas exécuté les travaux à la hauteur du financement perçu et désigner les coupables. Dossier à suivre.

Amédée Mwarabu

 

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