La République démocratique du Congo a pris la résolution de mettre en place un nouveau « système de contrôle des flux téléphoniques des réseaux des opérateurs des télécommunications ». Un contrat de partenariat a été signé depuis le 15 janvier 2018 entre la République démocratique du Congo à travers le ministre des Postes et Nouvelles technologies de linformation et de communication, Emery Okundji, et la société African General Investment Limited (AGI), représentée par sa Gérante, Mme Poonam Keenoo Seegoolam.
Selon ce contrat dont DESKECO.COM sest procuré une copie, la RDC donne lexclusivité, pendant 10 ans, à AGI de « Contrôler de manière durable et permanente : le volume dappels locaux, le volume des SMS émis et reçus, le volume des data déclaré par les opérateurs Télécoms pour mieux répondre aux exigences de la RDC ».
Pour matérialiser ce deal, le Premier ministre, Bruno Tshibala, est en phase de publier un décret devant définir les nouvelles taxes que les opérateurs des télécoms devront payer dès la mise en place du nouveau système de contrôle des flux téléphoniques par AGI. Ce projet de décret prévoit la création de deux nouvelles taxes dans les télécommunications, lune portant sur la gestion des réseaux des services des données et lautre sur les flux téléphoniques (trafic voix, trafic SMS, trafic data). Ces nouvelles taxes nexistent pas dans la nomenclature des taxes officielles de lAutorité de régulation des postes et télécoms (ARPTC).
Ces nouvelles redevances vont taxer les appels locaux à 0,0115 USD (1,15 cents) la minute des appels sortants intra réseaux, inter-réseaux et internationaux générés par chaque réseau; les SMS à 0,01 USD (1 cent) par SMS sortants intra réseau, inter-réseaux et internationaux générés ; linternet à 5% sur les revenus bruts générés par le service des données.
La mise en vigueur de ce décret du Premier ministre, prévue début décembre, va provoquer directement la hausse des prix des appels, de SMS et de la connexion internet en RDC de lordre de 60%, selon les experts. Concrètement, une carte de crédit de 10 USD va passer à 16 USD avec la nouvelle taxe. Chez les opérateurs de téléphonie cellulaire, ces nouvelles taxes vont augmenter la pression fiscale sur le secteur des télécommunications par un accroissement des charges à hauteur de 27% au minimum, renseigne-t-on.
Un contrat léonin ?
Le contrat entre la RDC et AGI sest conclu en marge des lois de la République. La RDC na jamais fait un appel doffre publique pour soumettre le contrôle des flux téléphoniques à tous les prestataires du secteur.
Selon certains acteurs économiques qui ont requis lanonymat, la Société AGI nest pas référencée à linternational parmi les prestataires des contrôles des flux téléphoniques et son expertise nest pas établie. Tout porte à croire, daprès eux, que AGI est une société écran créée pour le besoin de la cause. Dès lors, quelle garantie la RDC peut-elle avoir en confiant la gestion et la conservation des flux téléphoniques qui sont des données sensibles à un opérateur sans référence connue.
Selon les projections faites par ces experts, avec ces nouvelles taxes, le contrôle des flux téléphoniques vont générer mensuellement 27 millions USD dont, selon la clé de répartition définie dans le projet de décret du Premier ministre, 85% (22,9 millions USD) seront payés au seul prestataire AGI, 10% (2,7 millions USD) à lARPTC, 5% (1,35 million USD) à la « Commission mixte » non autrement identifiée.
AGI dont linvestissement pour la mise en uvre de son système de contrôle des flux téléphoniques ne peut aller au-delà de 1 million USD avec 200 000 USD des charges opérationnelles mensuelles, va engranger, à la faveur de ce contrat, près de 2,7 milliards USD en dix ans qui est la durée du contrat. Cette bagatelle somme va aller probablement loger dans les paradis fiscaux sans que la RDC nen bénéficie aucunement. Les quatre sociétés de téléphonie cellulaire ont investi, en 15 ans, 4 milliards USD en RDC.
Amédée MK