Le CNPAV exhorte l'Union européenne à renforcer ses outils de lutte contre la corruption, notamment en adoptant un régime des sanctions pour la grande corruption

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PAR Deskeco - 20 jan 2023 08:30, Dans Actualités

La police belge a perquisitionné 16 maisons et arrêté quatre personnes travaillant au Parlement européen, dans le cadre d'une enquête sur des soupçons selon lesquels le Royaume du Qatar pourrait avoir soudoyé des fonctionnaires de l'UE pour contrer les critiques pour violations des droits humains. La vice-présidente grecque du Parlement Eva Kaili a été arrêtée, ainsi que l'ancien président de la sous-commission des droits de l'homme Pier Antonio Panzeri, entre autres. 

Le scandale montre comment la corruption érode la démocratie et constitue une menace directe pour les droits de l'homme. Cela illustre également comment sa nature transnationale peut créer des défis pour les poursuites pénales, en particulier lorsque l'État qui héberge des acteurs corrompus ne coopère pas. Il est essentiel et urgent que l'UE renforce son arsenal pour lutter rapidement et rigoureusement contre ces cas de corruption.

Les mesures restrictives (c'est-à-dire les sanctions) devraient figurer en bonne place dans la boîte à outils remaniée de l'UE pour lutter contre la corruption. Lorsque l'UE a adopté le régime mondial de sanctions en matière de droits de l'hom me en 2020, la grande corruption restait en dehors de l'éventail des abus couverts par l'instrument, Cela distingue l'UE des États-Unis, du Royaume-Uni et du Canada, qui ont tous adopté un régime de sanctions pour la corruption de haut niveau.

La présidente de la Commission européerne, von der Leyen, a annoncé dans son état de l'union de septembre 2022 que l'inclusion de la corruption parmi les motifs de sanction serait un "outil pour protéger nos valeurs à l'étranger". Cependant, plusieurs États membres ont ralenti l'adoption d'un tel régime au sein du Conseil de l'UE, ou ont cherché à en limiter la portée et l'efficacité. Jusqu'à ce qu'un solide régime de sanctions contre la corruption entre en vigueur, l'UE risque de devenir un refuge pour les individus qui se livrent à la grande corruption.

C'est notamment le cas de la République démocratique du Congo, l'un des principaux bénéficiaires de l'aide financière de l'UE. Pour rappel, de nombreuses personnes impliquées dans la corruption en RDC continuent de faire des affaires au sein de l'UE ou, pire, ont déplacé leurs intérêts financiers sur le territoire de l'UE pour échapper à une surveillance plus stricte ailleurs.

C'est notamment le cas de l'homme d'affaires israélien Dan Gertler. Ses transactions suspectes ont causé des pertes à la RDC de plus de 2 milliards de dollars et lui ont valu des sanctions en vertu de la loi américaine Global Magnitsky. Cependant, Gertler utilise désormais la monnaie et le système bancaire européens pour continuer à collecter plusieurs millions d'euros chaque mois sur trois projets de cuivre-cobalt en RDC.

L'UE a déjà montré quelle est disposée et capable de traiter avec des hommes d'affaires qui se livrent à des pratiques préjudiciables à l'étranger. Au début du mois, le Conseil de l'UE a sanctionné Alain Goetz, négociant en or belge et propriétaire de la société ougandaise African Gold Refinery (AGR), en raison de ses relations d'affaires avec des groupes armés opérant dans l'est du Congo.

Si ces sanctions constituent un précédent bienvenu, il est temps pour l'Union européenne d'aller au-delà de cette affaire directement liée à un conflit armé, pour s'attaquer au problème plus large de la corruption qui porte atteinte à la démocratie, aux droits de l'homme et au développement. L'adoption d'un régime de sanctions pour la corruption de haut niveau est devenue une nécessité, non seulement pour regagner une légitimité auprès de ses propres citoyens, mais aussi pour protéger ceux qui sont touchés par des pratiques illicites similaires à l'étranger.

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