Plus de quarante (40) députés européens ont adressé une lettre à Josep Borrell Fontelles, Haut représentant de l'UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et Vice-président de la Commission européenne, pour exiger des sanctions contre le magnat israélien Dan Gertler, accusé de corruption et de blanchiment d'argent.
Ce groupe des députés européens estime que la corruption en République démocratique du Congo est toujours bien vivante et entraîne dans son sillage la violence, l'impunité et les violations des droits de l'homme. Ils regrettent que l'UE tarde à agir contre Gertler qui aurait amassé une fortune grâce à la corruption et l'opacité dans ses opérations minières et pétrolières.
"Entre 2007 et 2020, l'Union européenne (UE) et ses États membres ont fourni pas moins de 11,6 milliards d'euros d'aide à la RDC, faisant du pays le cinquième bénéficiaire de l'aide de l'UE dans le monde. L'UE, en tant que donateur majeur de la RDC, a donc un rôle crucial à jouer pour encourager une gouvernance transparente du pays tout en veillant à ce que des fonds corrompus n'entrent pas sur le marché européen.Pourtant, l'UE tarde à agir contre Dan Gertler, un ami proche de l'ancien président de la RDC, Joseph Kabila. Le magnat israélien aurait amassé une fortune grâce à des opérations minières et pétrolières opaques et corrompues", renseigne la lettre des députés européens.
A en croire ce groupe des députés, Dan Gertler aurait fait perdre à la RDC au moins 1,4 milliard USD de revenus entre 2010 et 2012 grâce à ses sociétés offshore. De l'argent qui aurait pu être alloué à la santé et à l'éducation en RDC.
"Entre 2010 et 2012, la RDC aurait perdu au moins 1,4 milliard de dollars de revenus en raison de la sous-évaluation des actifs miniers et pétroliers vendus à des sociétés offshore liées à Gertler. À l'époque, cette somme représentait le double des dépenses nationales allouées à la santé et à l'éducation, soit environ 20% du budget national annuel", résonne ladite lettre.
Ces députés européens rappellent à Josep Borrell qu'en 2017, le département américain du Trésor a infligé des sanctions à Dan Gertler pour ses activités frauduleuses en RDC, visant à mettre fin à une décennie d'activités opaques et à siphonner les revenus étrangers. Mais Dan Gertler semble avoir réussi à contourner ces sanctions en percevant ses revenus miniers en euros plutôt qu'en dollars américains, mais aussi en incorporant au moins une de ses holdings dans un État membre de l'UE.
De ce fait, ils invitent le Haut représentant de l'UE à renforcer des mesures européennes prises à l'encontre de Gertler pour ne pas que l'UE devienne un refuge sûr pour les fonds corrompus.
"Le cas de Dan Gertler est emblématique, car il montre comment l’UE devient, de facto, un refuge sûr pour les fonds corrompus et montre l’urgence de renforcer les mesures européennes prises à l’encontre de ces personnes. Il est impératif que l'UE veille à ce que ses institutions ainsi que la monnaie commune n'autorisent pas les crimes économiques qui nuisent à la RDC, en facilitant ou en contribuant à des transactions qui bénéficient à Dan Gertler et à ses associés. Les États-Unis et le Canada ont déjà incorporé la corruption dans leurs régimes de sanctions, tandis que le Royaume-Uni s'est engagé à le faire. Nous savons que les sanctions sont plus efficaces lorsqu'elles sont multilatérales. Nous pensons donc qu'il est important de mettre en place un régime de sanctions européen basé sur le même modèle afin que l'UE ne devienne pas un refuge sûr pour les acteurs corrompus", ont écrit ces députés.
Rappelons également qu'un groupe des sénateurs américains ont demandé à Janet Yellen, la secrétaire au Trésor américain d’ouvrir une enquête sur les motifs pour lesquels la licence d’une année permettant à Dan Gertler d’opérer des transactions en dollars, lui a été octroyée. Dans une lettre adressée à Janet Yellen, le 1er février 2021, ce groupe des Sénateurs américains exhorte également le Trésor américain à annuler immédiatement et publiquement la licence octroyée à Dan Gertler qui, à les en croire, viole l’esprit et la lettre de la loi Magnitski.
Jordan MAYENIKINI