La campagne “Le Congo n’est pas à vendre” (CNPAV) exhorte le gouvernement congolais à réformer le secteur bancaire, à la suite de nombreux rapports mettant en cause l’intégrité du système financier et présentant, selon elle, des risques importants pour la préservation de l'accès au dollars américain, rapporte un communiqué de ce Collectif parvenu aujourd’hui à DESKECO.COM.
« “Le Congo n’est pas à vendre” s'inquiète de voir une nouvelle publication mettant en cause une banque Congolaise. Le rapport « Affaires risquées », publié par l’organisation américaine « The Sentry », montre comment des entrepreneurs nord-coréens enfreignent des sanctions internationales en passant par le système bancaire congolais et la banque Afriland RDC. Ce rapport fait suite à un autre publié en juillet dernier par Global Witness et PPLAAF, « Des sanctions, mine de rien », selon lequel le milliardaire israélien Dan Gertler aurait utilisé la banque Afriland RDC pour contourner les sanctions américaines à son encontre. La société civile tire la sonnette d'alarme sur ces pratiques qui portent préjudice au développement du pays et pourraient porter atteinte à son économie et ses relations avec les États-Unis », note le communiqué.
« Le rapport de The Sentry, mais aussi celui de PPLAAF et Global Witness ont montré comment Afriland est devenu le refuge mais aussi le paradis de ceux qui cherchent à esquiver les sanctions internationales à leur encontre”, a commenté Jean Claude Mputu, porte-parole du CNPAV.
Dans son rapport, The Sentry soutient qu’en 2018, deux hommes d’affaires nord-coréens ont ouvert des comptes bancaires en RDC et mené des travaux apparemment financés par des fonds publics congolais, allant à l’encontre des sanctions de l’ONU, des États-Unis et de l’Union Européenne. Et en juillet dernier, l'enquête de PPLAAF et Global Witness exposait comment Dan Gertler aurait contourné les sanctions américaines à son encontre en utilisant un réseau de compagnies écrans et les services de cette même banque. Gertler, ami personnel et proche de Joseph Kabila, ancien président du Congo, a été sanctionné par les États-Unis en décembre 2017 suite à son implication dans des “contrats miniers et pétroliers opaques et entachés de corruption”.
« Ces deux rapports mettent en cause la branche Congolaise de la banque Afriland First Bank, basée au Cameroun. Celle-ci aurait autorisé certaines opérations possiblement frauduleuses, et permis à ce que d'énormes sommes soient déposées en espèces dans sa banque. De plus, elle n'aurait vraisemblablement pas fait preuve de la diligence requise à l'égard des personnes sanctionnées ou dans les procédures de la lutte contre le blanchiment d'argent. Ainsi, en 2018, les bénéfices de cette banque ont augmenté de près de 350 % », soutient “Le Congo n’est pas à vendre”.
En réaction au récent rapport de The Sentry, Afriland First Bank note que les constructions dans la province du Haut-Lomami ont été financées par la province et l’exécution a été faite au niveau local. En analysant le compte de ces clients, la banque dit n’avoir constaté aucun mouvement de transfert vers l’étranger « ni sortant ni entrant ». Afriland First Bank ajoute que c’est la Corée du Nord en tant que pays qui a été sanctionnée, mais pas tous les citoyens nord-coréens. La banque dit aussi que cette entreprise est privée et les deux clients dont il est question ne figurent pas sur la liste noire américaine. Avec ces arguments et considérant le fait que le rapport parle de plusieurs banques et ne cite qu’une seule, Afriland First Bank se considère comme victime d’un acharnement.
De même, sur le rapport de PLAAF et de Global, Afriland First Bank a porté plainte le 1er juillet 2020 au Tribunal judiciaire de Paris contre ces deux organisations en les chargeant de plusieurs chefs d’accusation dont vols et abus de confiance, chantage, corruption privée, violation du secret bancaire, faux et usage de faux, dénonciation calomnieuse, complicité et ou recel et bande organisée. Outre les deux Organisations, Afriland First Bank a traduit également en justice deux de ses anciens employés, Gradi Koko Lobanga et Navy Malela, qui auraient communiqué des secrets bancaires à Global Witness et PPLAAF.
Toutefois, face à tous ces rapports qui indexent le système bancaire Congolais, y compris la récente lettre des neuf sénateurs américains, et tenant compte du fait que plusieurs banques correspondantes ont coupé le pont avec la RDC, “Le Congo n’est pas à vendre” dit que le gouvernement Congolais doit agir non seulement en réformant le système mais aussi en punissant éventuellement les coupables à la suite d’une enquête judiciaire.
« Le gouvernement congolais ne peut plus rester silencieux et laisser les banques du Congo agir en toute impunité, mettant son économie et le bien-être de ces citoyens en péril. Le « Congo n’est pas à vendre » appelle donc le Président de la République du Congo à exercer pleinement son rôle de garant du bon fonctionnement des institutions pour s’assurer qu’une enquête judiciaire soit ouverte dans les plus brefs délais », dit ce Collectif.
DESKECO