A la lecture de la correspondance des sénateurs américains adressée au Département d’Etat et à celui du Trésor, le chantier de la lutte contre la corruption est encore vaste en RDC. Il faudra enquêter sur certaines banques et sociétés minières qui seraient trempées dans le blanchiment des capitaux. De même, il faudra tenir à l’œil tous les dignitaires de l’ancien régime qui s’adonneraient au blanchiment de l’argent volé en RDC. Pour autant, une aide serait nécessaire pour doter le gouvernement Congolais des moyens efficace de lutte contre la corruption.
Le président de la République, Félix Tshisekedi, a encore beaucoup à faire pour doter la corruption de haut niveau en RDC. Si les quelques actions entreprises jusque-là dans les Cours et Tribunaux sont saluées par les sénateurs américains, ces derniers font pression au gouvernement américain pour pousser Félix Tshisekedi à démanteler comme il l’avait promis les réseaux mafieux impliqués dans la corruption.
Dans une correspondance datée du 17 août 2020, neuf sénateurs américains ont écrit au Secrétaire du Trésor, Steven Mnuchin, et au Secrétaire d’Etat, Michael Pompeo, pour solliciter leur implication dans la normalisation de la situation en République démocratique du Congo en prévision des élections démocratiques en 2023 qui doivent se dérouler dans un climat serein. Et donc pour ces sénateurs, il faudra enclencher un mécanisme fort pour lutter contre la corruption en RDC.
« Le Financial Crimes Enforcement Network (FinCEN) du département du Trésor devrait examiner s'il est approprié d'émettre un avis de blanchiment des capitaux sur les risques de faire des affaires avec certaines parties des secteurs bancaires et minier de la RDC, en mettant particulièrement en évidence des liens avec des individus et des entités associées à la corruption. Une utilisation robuste des mesures de lutte contre le blanchiment d'argent pourrait perturber la capacité des responsables congolais de blanchir le produit de la corruption à l'étranger, y compris via les systèmes financiers américains et européens », ont écrit ces sénateurs dans leur lettre.
Dans cette perspective, les neuf signataires de la lettre demandent au Trésor américain de « fournir un appui technique » au gouvernement de la RDC pour « réviser son cadre de lutte contre le blanchiment des capitaux/ lutte contre le financement du terrorisme (LBC/FT) afin de répondre aux normes internationales ».
Ces sénateurs font pression sur Washington pour « désigner des responsables ou complice de corruption de haut niveau » en RDC, y compris ceux coupables de détournement d'actifs de l'État, pour des sanctions financières et de voyage ciblées.
Pour ces sénateurs, ces sanctions sont un « moyen essentiel de dissuader la corruption de haut niveau ». « Les sanctions se sont avérées efficaces en RDC ces dernières années. Le système financier de la RDC est fortement dollarisé et de nombreuses élites se rendent régulièrement dans les pays occidentaux et maintiennent des actifs dans le système financier mondial », estiment ces sénateurs américains.
Mieux, ils veulent que les États-Unis envisagent également des mesures pour traiter les personnes déjà sanctionnées qui contournent les sanctions en déclarant de nouvelles entreprises. « Les États-Unis devraient continuer à exhorter le gouvernement de la RDC à démettre de leurs fonctions les généraux qui ont été sanctionnés par les États-Unis pour leur implication dans des violations flagrantes des droits de l'homme, et à établir un mécanisme de responsabilisation pour les officiers militaires de haut niveau qui ont commis des crimes graves », soutiennent-ils.
Dans leur correspondance, ils appellent le gouvernement américain à peser de son poids pour que les réformes anti-corruption soient une condition préalable à l’octroi des prêts du FMI.
"Le directeur exécutif du FMI devrait insister sur les réformes anti-corruption, en particulier en ce qui concerne la transparence du secteur minier, comme condition pour un futur prêt de la Facilité de crédit élargie du Fonds monétaire international (FMI) au gouvernement de la RDC. En particulier, le gouvernement de la RDC devrait être tenu de veiller à ce que les entreprises publiques publient des rapports financiers annuels, subissent et publient les résultats d'audits indépendants et remplacent les fonctionnaires de leur haute direction qui ont été utilisés dans une corruption à grande échelle. Le gouvernement de la RDC devrait également être tenu de veiller à ce que les contrats miniers soient publiés", disent-ils dans leur lettre.
Le président Félix Tshisekedi avait conclu, lors de son voyage en avril 2019 aux Etats-Unis, un accord de partenariat avec Washington. Cet accord se décline essentiellement sur la lutte contre la corruption et le blanchiment des capitaux ainsi que sur la promotion des droits humains en RDC.
Les signataires de la lettre sont les sénateurs JAMES E. RISCH, ROBERT MENENDEZ, MARCO RUBION, BENJAMIN L. CARDIN, TED CRUZ, CHRISTOPHER A. COONS, DAVID A. PERDUE, TIM KAINE et CORY A. BOOKER.
Amédée Mwarabu