Selon le comité de suivi de la paie des agents de lEtat ces rémunérations devraient être bloquées immédiatement. 4 516 agents devraient bénéficier dun moratoire dont la durée devrait être déterminée au cas par cas, sans toutefois dépasser 3 mois. Cette situation fait disparaître dimportant moyen à lEtat. La rédaction de deskeco.com revient ici sur les origines de ces comptes déclarés « non-identifié » par le comité de suivi de la paie des agents de lEtat.
Ce que dit le contrat signé entre le Gouvernement et lACB
Dans le but de rationaliser la paie des agents de lEtat, assainir le fichier de la paie et maîtriser la masse salariale, le Protocole dAccord sur la Paie des agents et fonctionnaires de lEtat a été signé le 02 décembre 2012 entre, dune part, le Gouvernement du Congo, représenté, à cette occasion, par: Le Vice-Premier Ministre, Ministre du Budget, Daniel MUKOKO SAMBA ; -le Ministre de la Fonction Publique, Jean-Claude KIBALA NKOLDE ; Le Ministre Délégué auprès du Premier Ministre, chargé des Finances, Patrice KITEBI KIBOL MVUL. Dautre part, lAssociation Congolaise des Banques "ACB" représentée par Yves CUYPERS, Président ad intérim.
Le Gouvernement congolais avait pour responsabilité de : transmettre à lACB les listings de paie des agents et fonctionnaires de lEtat en formats électronique et papier, préalablement visés par le Ministère de la Fonction Publique ; prendre en charge les frais de tenue de compte, ainsi que la rémunération des prestations des membres de lAssociation, arrêtée à léquivalent en francs congolais de USD 3,6 HT (trois dollars américains et soixante centimes hors taxe) par agent ou fonctionnaire payé, de commun accord avec cette dernière ; garantir, par le biais de la Banque Centrale du Congo, la liquidité des opérations de paie des fonctionnaires et agents de lEtat afin déviter les problèmes de trésorerie afférents à la paie auprès des Banques commerciales intervenantes ; Inviter les fonctionnaires et agents de lEtat à se présenter individuellement au guichet de la Banque commerciale qui leur sera désignée.
Les banques commerciales devraient : gérer la répartition des listings entre les banques commerciales intervenantes ; veiller au paiement du salaire de base et de la prime des agents et fonctionnaires dun service public par une même banque commerciale ; obtenir auprès des différentes Banques commerciales intervenantes, louverture de comptes individuels en francs congolais pour les fonctionnaires et agents de lEtat ; adresser au Gouvernement, par le biais du Comité de Suivi de la Paie ; veiller à ce que chaque banque commerciale intervenante accomplisse ses obligations (Procéder à louverture de comptes individuels pour les agents et fonctionnaires de lEtat désignés sur les listings, Rendre les salaires disponibles dans les comptes des bénéficiaires, ).
La discordance des listings entraîne la disparition de 100 millions USD en cinq an
Cinq ans après lopération de bancarisation, un audit de la Cour des comptes de 2016 sinquiète de la mauvaise application des clauses de contrat entre le Gouvernement congolais et lassociation des banques commerciales. Cet organe de contrôle constate la persistance et accroissement des reliquats de la paie ; non actualisation des listings de paie ; destination incorrecte des listings de paie envoyés en provinces par la Direction de la Paie ; non-paiement des agents et fonctionnaires de lEtat affectés dans les localités éloignées des succursales des banques commerciales intervenantes ; discordances entre les listings de paie et les avis des crédits ; Faible taux de bancarisation ; Non tenue des engagements par les parties prenantes au Protocole dAccord.
Par ailleurs, la cour des comptes identifie des nombreuses discordances entre les montants de listings de paie et des avis de crédits. Pour lexercice 2015 par exemple, les listings totalisent CDF 527 024 907 689,10 (315 772 862,60 USD) tandis que les avis de crédits donnent, quant à eux, un montant de CDF 689 942 066 323,63 (413 386 498,69 USD) soit un écart de 162 917 158 634,53 FC soit 100 millions USD des salaires des agents de lEtat, fait remarquer la Cour des Compte. Pour effectuer la paie, les banques font recours à des guichets mobiles (Agents payeurs des banques ou sous-traitants).
Lors de la session ordinaire de septembre 2017, le rapport de la cour des comptes sur la bancarisation est déposé au bureau de lassemblée nationale pour examen. Cependant, le Bureau de la chambre basse refuse de linscrire à lordre du jour de la session. Du coup, il était donc difficile de retracer les 100 millions USD des salaires des agents de lEtat.
Faible couverture des banques à lorigine de l'accroissement des reliquats?
Le reliquat de la paie est une résultante du montant sur lavis de crédit alimentant la liquidité des banques intervenantes et le listing de paie établissant lexigibilité des rémunérations dues aux agents et fonctionnaires de lEtat. Par une correction à retards échelonnés, sur base des rapports sur la paie, les montants libellés sur les avis de crédit devraient concorder, au bout dune période, avec ceux portés sur les listings de paie.
Les banques chargées de payer les agents de létat ne couvrent pas entièrement toutes les localités de la RDC où sont affectés les agents et fonctionnaires de lEtat. A titre illustratif, le cas de la province du Haut Lomami qui ne dispose que dune seule banque, à savoir la TMB, laquelle nest implantée que dans le chef- lieu ; la province du Kasaï central où certains agents sont payés par Airtel Money comme sous-traitant de RAWBANK, succursale de Kananga. Selon le syndicat des enseignants du Congo, le séjour sur place de ces guichets mobiles nexcède pas généralement trois jours.
Par conséquent, les salaires non payés sont retournés à la Banque, qui les assimile aux reliquats à verser dans le sous-compte du compte général du Trésor. Le rapport de la Cour des comptes sur la bancarisation a découvert un reliquat de 15 318 810 388,59 FC soit 9,178 millions USD en 2016.
Pour pallier la déficience des banques commerciales intervenantes, la Cour des Comptes avait recommandé au Gouvernement dimpliquer les institutions financières publiques telles que la CADECO et la Société Commerciale des Postes et Télécommunications (SCPT), qui sont implantées à travers toutes la République et qui ont eu, dans le passé, à effectuer de manière satisfaisante ce genre dopération; la Poste y a facilité la paie des salaires des agents et fonctionnaires par voie des mandats postaux. La même recommandation a toujours été formulée par les organisations de la société civile. Mais, les différents gouvernements ont toujours fait fi de la proposition.
Sept ans après lapplication de la bancarisation, les reliquats persistent et samplifient davantage. La découverte de 5 823 agents non « identifiés » est une opportunité pour le nouveau gouvernement de faire la lumière sur cette affaire.
VM Goffman