Le président de la République, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, vient de prendre une décision salutaire pour la bonne gouvernance du secteur des télécommunications en rapportant, à l'issue de la réunion interinstitutionnelle tenue le vendredi 1er janvier, le contrat portant sur le contrôle des flux téléphoniques conclu entre l'Autorité de régulation des postes et télécommunications (ARPTC) et une compagnie dénommée African general investment (AGI).
Retour sur ce scandaleux contrat que DESKECO.COM a eu à alerter sur son caractère mafieux à tout point de vue.
Selon ce contrat, la RDC donne lexclusivité, pendant 10 ans, à AGI de « Contrôler de manière durable et permanente : le volume dappels locaux, le volume des SMS émis et reçus, le volume des data déclaré par les opérateurs Télécoms pour mieux répondre aux exigences de la RDC ».
Pour matérialiser ce deal, le Premier ministre, Bruno Tshibala, avait publié en décembre 2018 un décret définissant les nouvelles taxes que les opérateurs des télécoms devraient payer dès la mise en place du nouveau système de contrôle des flux téléphoniques par AGI.
Le décret de Bruno Tshibala a créé deux nouvelles taxes dans les télécommunications, lune portant sur la gestion des réseaux des services des données et lautre sur les flux téléphoniques (trafic voix, trafic SMS, trafic data). Ces nouvelles taxes nexistent pas dans la nomenclature des taxes officielles de lAutorité de régulation des postes et télécoms.
Ces nouvelles redevances devraient taxer les appels locaux à 0,0115 USD (1,15 cents) la minute des appels sortants intra réseaux, inter-réseaux et internationaux générés par chaque réseau; les SMS à 0,01 USD (1 cent) par SMS sortants intra réseau, inter-réseaux et internationaux générés ; linternet à 5% sur les revenus bruts générés par le service des données.
La mise en vigueur de ce décret du Premier ministre sortant allait provoquer directement la hausse des prix des appels, de SMS et de la connexion internet en RDC de lordre de 60%, selon les experts des télécommunications. Concrètement, une carte de crédit de 10 USD devrait passer à 16 USD avec la nouvelle taxe. Chez les opérateurs de téléphonie cellulaire, ces nouvelles taxes augmenteraient la pression fiscale sur le secteur des télécommunications par un accroissement des charges à hauteur de 27% au minimum, renseigne-t-on.
Un contrat léonin ?
Le contrat entre la RDC et AGI sest conclu en marge des lois de la République. La RDC na jamais fait un appel doffre publique pour soumettre le contrôle des flux téléphoniques à tous les prestataires du secteur.
Selon certains acteurs économiques qui ont requis lanonymat, la Société AGI nest pas référencée à linternational parmi les prestataires des contrôles des flux téléphoniques et son expertise nest pas établie. Tout porte à croire, daprès eux, que AGI est une société écran créée pour le besoin de la cause. Dès lors, quelle garantie la RDC pouvait avoir en confiant la gestion et la conservation des flux téléphoniques qui sont des données sensibles à un opérateur sans référence connue.
Selon les projections faites par les experts, avec ces nouvelles taxes, le contrôle des flux téléphoniques devrait générer mensuellement 27 millions USD dont, selon la clé de répartition définie dans le décret Bruno Tshibala, 85% (22,9 millions USD)devraient revenir au seul prestataire AGI, 10% (2,7 millions USD) à lARPTC, 5% (1,35 million USD) à la « Commission mixte » non autrement identifiée.
AGI dont linvestissement pour la mise en uvre de son système de contrôle des flux téléphoniques ne peut aller au-delà de 1 million USD avec 200 000 USD des charges opérationnelles mensuelles, devrait engranger, à la faveur de ce contrat, près de 2,7 milliards USD en dix ans qui est la durée du contrat. Cette bagatelle somme irait probablement loger dans les paradis fiscaux sans que la RDC nen bénéficie aucunement. Par comparaison, les quatre sociétés de téléphonie cellulaire ont investi, en 15 ans, 4 milliards USD en RDC.
Amédée MK