Les analyses juridiques des experts de lONG internationale Global Witness révèlent que le contrat entre la compagnie pétrolière COMICO et la République démocratique du Congo serait « nul et non avenu » car il ne cadre pas avec les dispositions de loi de 2015 sur les Hydrocarbures.
« D'après notre évaluation juridique, le contrat de CoMiCo serait à considérer comme nul, ce qui signifie que la CoMiCo ne devrait pas mener de prospection pétrolière dans ses blocs », déclare Peter Jones, Responsable de campagne à Global Witness, dans un communiqué publié ce vendredi 1er février que DESKECO.COM a consulté. Selon lui, « toute tentative d'exploration sur la base de ce contrat créerait un dangereux précédent, étant donné que le gouvernement semble avoir bafoué ses propres lois ».
Tablant sur les analyses juridiques des ses experts, Global Witness soutient qu« à la lumière du contrat et de la législation pétrolière actuelle, il semblerait quau lieu de donner le feu vert tant attendu pour entamer la prospection pétrolière, l'ordonnance présidentielle signée en février 2018 ait rendu le contrat invalide ».
« Le contrat de CoMiCo est officiellement entré en vigueur après la signature de l'ordonnance présidentielle, et il contient des clauses non conformes à la nouvelle loi de 2015 portant régime général des hydrocarbures. La loi précise que tout contrat entré en vigueur après 2015 ne peut contenir des stipulations dérogeant à la présente loi, « sous peine de nullité », note lONG britannique.
Plus concrètement, pour Global Witness, « le contrat de la CoMiCo n'est pas conforme aux dispositions de la loi 2015 pour ce qui concerne les taxes superficiaires, les taux de redevance, le profit oil et le renouvellement des permis d'exploration ». Tout aussi, soutient cette ONG, « sur la plupart des points essentiels où le contrat s'écarte de la loi actuelle, la différence est à l'avantage de la CoMiCo, potentiellement au détriment des fonds publics de la RDC ».
Le nouveau président de la République, Félix Tshisekedi, a pris le pouvoir le 24 janvier 2019. « Le Président Tshisekedi et son administration doivent saisir cette opportunité daméliorer le bilan des gouvernements précédents en veillant à une adhérence stricte de la loi congolaise en matière daccords en ressources naturelles, surtout concernant la transparence autour des contrats et des bénéficiaires réels des entreprises en ressources naturelles » a déclaré Peter Jones, Responsable de campagne à Global Witness.
Sous son prédécesseur, Joseph Kabila, le gouvernement envisageait d'ouvrir le parc national de la Salonga à l'industrie des énergies fossiles.
En février 2018, le gouvernement a annoncé la création d'une commission interministérielle chargée d'examiner la possibilité de redessiner les limites du parc, afin de « déclasser » les zones concernées par les concessions pétrolières. « Cela mettrait en péril son statut de patrimoine mondial, ce qui lui ferait perdre les protections normalement accordées aux sites de l'UNESCO », pense Global Witness.
« La prospection pétrolière dans le parc national de la Salonga pourrait avoir un effet dévastateur sur l'intégrité du parc, sa biodiversité et les communautés locales qui vivent de ses ressources », a déclaré Jones. « La Salonga abrite 40 % de la population mondiale de bonobos et plusieurs autres espèces rares et menacées, et joue un rôle fondamental dans l'atténuation du changement climatique. Il est essentiel que ladministration de Felix Tshisekedi affirme lengagement de la RDC à protéger lenvironnement », a-t-il ajouté.
Les allégations de Global Witness sont récusées par lavocat de COMICO. Ce dernier conteste la façon « clairement erronée » dont Global Witness interprète les termes du contrat et le cadre juridique de la RDC. Il réfute la nullité du contrat et fait valoir que la clause de stabilisation qui y figure « prend effet suivant les conditions en vigueur en 2007 ».
Dans ce communiqué, Global Witness appelle le nouveau gouvernement congolais à revoir le contrat de la CoMiCo à la lumière des questions soulevées. Pour cette ONG, la RDC devrait également : « démanteler la commission interministérielle chargée d'examiner les projets de déclassement du parc national de la Salonga ; appliquer les aspects du code pétrolier liés à la transparence, notamment en assurant la publication des contrats ; et renouveler son engagement international à protéger les sites classés patrimoine mondial en annulant immédiatement tous les blocs pétroliers ou concessions de ressources naturelles qui affectent ces sites ou leurs zones tampon ».
Amédée MK