Faustin Luanga Mukela, titulaire d'un doctorat en Sciences Économiques de l'Université de Nagoya au Japon, et haut fonctionnaire de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC), met en lumière les défis économiques auxquels la République démocratique du Congo (RDC) fait face dans un contexte continental plus large.
Dans une analyse critique envoyée à notre rédaction, Luanga Mukela souligne que la RDC, tout comme l'Afrique en général, se trouve dans une situation où elle produit ce qu'elle ne consomme pas et consomme ce qu'elle ne produit pas. Cette réalité crée une dépendance économique et une vulnérabilité aux fluctuations du marché international, une situation jugée inacceptable compte tenu du potentiel du pays.
« Avec sa petite base productive, un secteur manufacturier embryonnaire (environ 10% du PIB), la RDC produit peu, transforme peu, exporte peu, et importe plus, d’où le déficit chronique de sa balance commerciale », dit-il.
Luanga Mukela appelle à un changement radical dans la stratégie économique du pays, en mettant l'accent sur l'élargissement de la base productive et le développement de secteurs et de produits stratégiques. Parmi ces secteurs figurent les ressources minières telles que le cobalt, le coltan, le cuivre et le lithium, ainsi que l'agriculture avec des produits comme le café, le thé, les haricots, l'huile de palme et le maïs.
L'expert insiste sur la nécessité d'organiser la production, la transformation, le transport et la distribution de ces produits, en développant des politiques cohérentes et en intégrant des chaînes de valeur globales ou régionales.
« Le combat doit commencer par inverser la tendance : organiser et élargir la base productive, développer la culture des produits à exporter. Le réalisme nous oblige et nous impose d’être sérieux; de faire de choix de secteurs et de produits stratégiques tels le cobalt, coltan, cuivre, lithium, etc. (pour les mines); café, thé, haricots, huile de palme, riz, maïs, manioc, etc. (pour l’agriculture), télécom, e-commerce, tourisme, banques, assurances et transport, etc. (pour les services) », explique t-il.
Cependant, Luanga Mukela souligne qu'avant de mettre en œuvre cette vision, il est impératif de rétablir la paix et la sécurité, d'investir dans l'éducation, la santé, la bonne gouvernance et les infrastructures essentielles. Il plaide pour l'élaboration d'un plan global pluriannuel, incluant des plans sectoriels détaillés avec des objectifs mesurables et des mécanismes de financement innovants.
L'expert exhorte également l'État à jouer un rôle de stratège en renforçant son rôle d'orientation et de soutien au secteur privé. Il encourage une vision audacieuse pour le développement économique de la RDC et appelle à saisir les opportunités qui s'offrent pour réaliser un changement significatif dans le pays.
« L’Etat doit devenir stratège et s’approprier de l’intelligence économique. L’Etat ne doit pas être émasculé, il doit être renforcé aux fins de bien orienter et mieux accompagner le secteur privé, voir même le créer. Osons oser! C’est possible, c’est faisable », dit-il.
En conclusion, Luanga Mukela lance un appel à l'action, soulignant que la transformation économique de la RDC est non seulement possible, mais également réalisable si des mesures stratégiques et durables sont mises en place.
Magalie Kabale