Le ministre de la Justice, Tunda Ya Kasende, répondant aux questions des journalistes dans l’émission « Top Presse » de Top Congo du samedi 16 mai, a tenu une fois de plus à s’expliquer sur sa lettre du 17 avril 2020 adressée au Procureur général près la cour de cassation de Kinshasa/Gombe dans laquelle il lui rappelait l’impérieuse nécessité de respecter la loi dans l’instruction des dossiers.
A la question du journaliste « pourquoi d’un côté vous donnez injonction qu’on arrête Blattner (NDLR : DG de Safricas, entreprise engagée dans les travaux du Programme de 100 jours) et de l’autre vous donnez injonction qu’on n’arrête pas Patient Sayiba ? Le ministre Tunda ya Kasende a répondu : « Je n’ai jamais donné injonction qu’on n’arrête pas Sayiba. D’ailleurs la loi ne me l’autorise pas. L’injonction doit être positive. En tant que ministre de la Justice, je ne peux pas donner une injonction négative. Vous me prêtez des fausses intentions ».
Et quand le journaliste le relance pour lui rappeler la lettre adressée au Procureur général près la Cour de cassation de Gombe de retirer son mandat d’amener contre Patient Sayiba, le VPM de la Justice a tenu à remettre les pendules à l’heure : « Ça c’est une question purement légale. J’ai voulu juste prouver le respect de la loi, tout simplement. Je n’ai pas donné injonction négative pour qu’on n’arrête pas telle ou telle autre personne. Je ne pourrais pas le faire. Je suis respectueux de la loi. Quand la justice veut arrêter quelqu’un, elle ne demande pas ma permission. Si la justice veut arrêter quiconque ce n’est pas chez moi qu’il vient frapper à la porte… Sayiba est Congolais. Il a droit à la protection de l’Etat comme tout citoyen Congolais. Pourquoi Sayiba ne devrait pas avoir droit à la protection de l’Etat Congolais ou de la Justice ? ».
Rappelons que Célestin Tunda Ya Kasende, dans sa correspondance du 17 avril adressée au Procureur général près la cour de cassation de Kinshasa/Gombe avec pour objet « Respect de la loi par rapport à l’instruction des dossiers par le Parquet près la cour de cassation », avait rappelé au concerné qu’il ne peut « exercer les fonctions du ministère public, en ce compris l’action publique, que pour les justiciables de la cour de cassation » en vertu de l’article 72 de la loi organique n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire.
Prenant le cas du dossier du mandat d’amener délivré à l’encontre du directeur général de l’Ogefrem, Patient Sayiba, le VPM de la Justice s’est inquiété du fait que le parquet près la cour de cassation ait pu instruire une action dont le justiciable ne relève pas de sa naturelle compétence. Et encore que si cela était le cas, précisait Tunda Wa Kasende, il aurait fallu une autorisation spécifique.
« Il devrait être mis fin à cette pratique en marge de la loi qui ne favorise pas l’émergence de l’Etat de droit, et de la même façon de faire retirer de circulation le susdit mandat aux fins de se conformer à la loi », martelait le ministre de la Justice dans sa lettre, instruisant le Procureur général de faire retirer ce mandat somme toute illégal.
En réaction à cette lettre, le Procureur général a pris acte tout en précisant que l’action menée était plus « de la supervision » et non « de l’instruction ». Toutefois, il a rassuré le VPM de la Justice que l’enquête en cours suivra les procédures en la matière.
Cependant, après cet échange épistolaire entre le ministre de la Justice et le Procureur Général près la Cour de Cassation, il est de nouveau signalé une réquisition, circulant sur les réseaux sociaux, adressée à la DGM avec copie à l'ANR en provenance du même Parquet et à charge de Patient Sayiba. Face à ce nouvel épisode, les proches du DG de l’OGEFREM disent se conforter dans leur thèse selon laquelle certains magistrats essaieraient de profiter des procès en cours en rapport avec le Programme de 100 jours du Chef de l'Etat pour « traquer certains mandataires sans raison ».
Pour autant, Tunda Ya Kasende a promis, au cours de Top Presse, de respecter ses attributions en tant que ministre de la Justice et qu’il continuera à collaborer avec le pouvoir judiciaire tout en respectant son indépendance sans immixtion aucune.
« Je ne sortirai jamais du cadre légal dans l’exercice de mes fonctions. Je dois coopérer et collaborer avec le pouvoir judiciaire dans leur indépendance sans m’immiscer dans leur responsabilité lorsqu’ils doivent dire le droit. Quand vous prenez l’ordonnance du président du 10 juillet 2017 qui a été récemment renouvelée et vous prenez les attributions du ministère de la Justice, il est dit : Suivi de l’exécution la politique judiciaire du gouvernement par les cours et tribunaux et les parquets y rattachés. Contrôle des activités judicaires. Surveillance générale sur le personnel judiciaire. Suivi des réformes institutionnelles », a rappelé le Garde des Sceaux.
Amédée Mwarabu