L'élu de la ville de Butembo, dans la province du Nord-Kivu, Crispin MBindule, estime que les activités des groupes armés dans cette partie de lEst de la Rdc nont jamais profité au développement économique de la contrée. Il fustige que la présence des groupes armés défavorise les activités commerciales dans la ville de Butembo.
« Linsécurité, la présence des groupes armés, étrangers comme locaux, ne profite pas au développement du milieu. Les gens pensent que le commerce qui existe dans la partie nord de la province du Nord-Kivu est né avec les groupes armés. Je dis « non ». Nous, nous sommes des opérateurs économiques depuis des années 1960, juste après lindépendance, parce quon faisait le commerce entre le Congo et lOuganda. On achetait du sel pour venir revendre au Congo. On faisait ce commerce depuis longtemps. Et vous imaginez à lépoque du Marechal Mobutu, lagglomération de Butembo était devenue un grand centre commercial où les nationaux venaient se ravitailler. Les gens provenaient de Kinshasa, de Lubumbashi, du Kasaï, de la Province Orientale (à lépoque cétait la province du Haut-Zaïre), tous venaient acheter les biens, des marchandises, des articles à Butembo. Et Butembo était appelé « Dubaï du Zaïre » à lépoque. Nos opérateurs économiques se sont fait beaucoup dargent à cette époque-là. Quest-ce qui sest passé ? Tout a commencé avec larrivée de lAFDL. Parce quon nous a fait croire que lAFDL venait pour le changement à tout les niveaux. Et nous pensions quavec lAFDL, nous allons désormais développer notre commerce. Malheureusement, nous navons rien profité. Les commerces sont tombés. Il y a eu plusieurs groupes armés qui ont pris naissance. Aujourdhui, nous sommes au niveau de 70 groupes armés qui fonctionnent dans le grand-nord seulement. Ce nest pas dans toute province du Nord-Kivu, mais seulement dans une partie de la province, 70 groupes armés », explique l'élu de Butembo.
Crispin Mbindule, au nom de la population de Butembo quil représente, demande au nouveau Chef de lEtat, Félix-Antoine Tshisekedi, de trouver des mesures adéquates pour mettre définitivement fin à lactivisme des groupes armés dans la province du Nord-Kivu. Pour lui, seule la force militaire est la solution pour en finir avec les groupes armés. Et pour ce faire, il propose le changement du commandement tant des FARDC que de la police.
« La population de Butembo, la population du grand-nord demande au pouvoir actuel, au Chef de lEtat actuel, Félix Tshisekedi, de mettre hors détat de nuire tous ces groupes armés. Il y a des groupes armés étrangers, en provenance du Rwanda, de lOuganda , et il y a dautres groupes armés locaux, des Maï-maï, des Nyatura, etc. Nous demandons que le Chef de lEtat puisse mettre fin à ces groupes armés. Et il ny a quune seule méthode. Cest la force. Ce nest pas la négociation. Quon utilise la force militaire pour mettre fin à ces groupes armés. Cest ça notre demande. Et pour mettre fin à ces groupes armés, justement on utilise la force, mais avec quelle force ? On doit tout faire pour changer le commandement militaire. On doit relever les militaires qui sont là depuis le Maréchal Mobutu. On doit relever le commandement de la Police. Parce que les policiers qui sont là, datent aussi de lépoque de Mobutu. Nous étions des petits enfants, ils étaient là, jusquau jour daujourdhui, ils continuent à être là. Donc, ils sont devenus des chefs coutumiers dans ce milieu. Il faut amener des nouvelles unités pour frapper les groupes armés et installer la Police dans les milieux récupérés par notre armée. On est en train de parler du terrorisme. Lorsquon en parle, les gens pensent que ce sont des groupes sur-militarisés. Je vous dis « non ». Si notre armée les attaque, elle est capable de les maîtriser, de les contenir et de faire régner la paix dans cette partie de la République », a-t-il insisté.
De son avis, les activités des groupes armés qui pillent des minerais au Congo ne profitent pas aux Congolais, mais plutôt aux Rwandais et aux Ougandais, etc. Puisque la plupart de ces groupes armés sont dorigine rwandaise ou ougandaise. Et il estime que linsécurité ou la présence des groupes armés dans la région, défavorise les commerçants locaux à opérer.
« Si vous arrivez à Butembo, et que vous trouvez des bâtiments, des immeubles, ne pensez pas quils sont construits aujourdhui. Ils ont été construits à lépoque du Maréchal Mobutu, quand il ny avait pas des groupes armés. Si vous arrivez dans la ville de Butembo vous allez trouver des boutiques, des magasins fermés, parce quil y a linsécurité, on ne sait pas travailler. Les groupes armés exploitent effectivement des minerais. Mais, qui profitent de ces minerais ? Ce ne sont pas des Congolais. Ce sont les Rwandais, les Ougandais, etc. Parce que la plupart de groupes armés qui exploitent les minerais au grand-nord du Nord-Kivu, sont dorigine rwandaise ou ougandaise. Donc, linsécurité, la présence des groupes armés défavorise vraiment les locaux à opérer. Je vous donne un exemple. Vous savez que nous sommes le premier peuple zaïrois à faire des activités commerciales avec des asiatiques, notamment avec des Chinois. Pour amener la marchandise, il faut passer par la frontière avec lOuganda. De la frontière de Kasindi par exemple, jusquà Butembo, quand vous êtes sur cette route, il faut commencer à prier votre dieu pour ne pas être attaqué. La marchandise est souvent pillée en cours de route, des véhicules brûlés, etc. Donc, linsécurité ne profite pas aux commerçants », a-t-il affirmé.
Butembo daujourdhui est très différent de ce quil était il y a vingt ans, selon lhonorable Crispin Mbndule. Il signale que des activités économiques ont baissé considérablement dans la ville de Butembo. Et les commerces sont tombés par terre à cause de linsécurité.
« Aujourdhui si vous arrivez dans la ville de Butembo, ce que vous voyez, est totalement différent dil y a vingt-ans passés. A cette époque, la ville était belle, il y avait des fortes activités. Mais actuellement si vous y arrivez, cest comme un désert. Vous pouvez même rouler à 60 kilomètres à lheure. Parce quil ny a pas de monde. La ville de Butembo vivaient des gens qui venaient de lextérieur. Ce nétaient pas seulement les nationaux, les Kinois, les Katangais qui venaient acheter chez nous. Non. Même les étrangers, les Ougandais et autres, venaient acheter. Nous sommes la première ville congolaise où les commerçants des pays étrangers venaient acheter des marchandises. Il y avait ceux de lOuganda qui achetaient chez nous, ceux du Soudan, du Sud-Soudan, de la Centrafrique qui venaient également acheter leurs marchandises à Butembo. Puisque les articles coûtaient moins-cher. Sans oublier les commerçants en provenance du Rwanda, du Burundi, de la Tanzanie, qui traversaient la frontière pour venir acheter au Congo chez nous. Mais aujourdhui, vous nallez plus voir tous ces gens. Donc, la présence des groupes armés défavorise notre commerce dans la ville de Butembo. Cest pourquoi nous sommes contre lactivisme des groupes armés », fait-il savoir.
Et de conclure : « Ceux qui font la propagande ici en affirmant que nous sommes pour ces groupes armés, ils trompent. Ils veulent que le commerce ne puisse pas prospérer à Butembo. Sachant bien que nous ne vivons que du commerce, nous sommes un peuple commerçant, cest connu partout en Afrique. Maintenant nous sommes en train de quitter le Congo pour aller ailleurs. Aujourdhui nous sommes des investisseurs à Djakarta. On vous présentera quil y a des investisseurs noirs. Mais si vous fouillez, vous trouverez quils viennent de Butembo. Si vous allez au Kenya, vous allez trouver que les investisseurs étrangers sont souvent des Congolais qui viennent de Butembo. Parce que le capital quon a, on ne sait pas où le mettre. Cest à cause de linsécurité à Butembo. Maintenant nous sommes obligés daller partout à travers le monde pour chercher les marchés. Et ce nest pas normal du tout. Voilà pourquoi nous demandons au Gouvernement de la République de tout mettre en uvre pour faire régner la paix à Butembo, dans toute la province du Nord-Kivu et dans tout le pays. Sil y a la paix, jespère que les Kinois niront plus en Chine acheter des marchandises. Ils niront plus à Dubaï, ils vont se tourner vers Butembo pour acheter leurs marchandises sans dépenser des gros montants quils déboursent pour les voyages en Chine ou à Dubaï ».
Propos recueillis par Lepetit Baende