RDC : transparence déficiente, contrebande, fraude et informalité fragilisent le secteur diamantifère congolais, exposé au commerce illégal

DESKECO.COM
PAR Deskeco - 12 juin 2025 12:07, Dans Mines

Le secteur diamantifère en République démocratique du Congo est confronté à de nombreux obstacles qui freinent son développement. Sa gouvernance reste fragilisée par un manque criant de transparence, la contrebande, la fraude, une forte prédominance d'activités informelles ainsi qu'un circuit de commercialisation souvent illégal.

D'après l'International Peace Information Service (IPIS), cette opacité alimente un climat de méfiance et soulève des soupçons de détournement des recettes fiscales. Dans des provinces riches en gisements, comme le Kasaï-Oriental qui détient 96 % de la production nationale, les retombées économiques attendues, notamment sous forme de redevances, ne bénéficient pas pleinement au développement local.

Des sociétés telles que la Société Anhui-Congo d'Investissement Minier (SACIM) sont régulièrement pointées du doigt pour ne pas s'acquitter de la redevance communautaire de 0,3 %, censée revenir aux populations locales.

« Bien que la loi prévoie la redistribution des recettes fiscales aux autorités provinciales et locales, ces fonds parviennent rarement à destination, à savoir sur les comptes bancaires des entités locales. Pour finir, certaines autorités locales ont été accusées d'avoir détourné ces fonds », indique le rapport.

Un rapport du comité exécutif de l'ITIE-RDC a notamment révélé un écart important entre les paiements fiscaux déclarés par SACIM, l'un des principaux acteurs du secteur diamantifère, et les montants enregistrés par le gouvernement. Pour l'année 2022, SACIM a déclaré avoir versé 18,4 millions USD, tandis que les autorités n'ont reconnu que 6,3 millions USD, soulevant ainsi de sérieuses interrogations sur la traçabilité et la gestion des revenus issus de l'exploitation du diamant.

Un autre obstacle majeur à l'essor du secteur réside dans le fait qu'une grande partie des transactions s'effectue en dehors des circuits légaux, échappant ainsi au contrôle de l'État et privant le pays de recettes importantes.

« Les colis de diamants sont censés être enregistrés au moyen d'un "bordereau de constat", mais cette obligation est souvent ignorée. Le SAEMAPE et le CEEC, deux structures de contrôle, ne possèdent pas les ressources nécessaires pour assurer une présence permanente sur toutes les mines et dans tous les bureaux des négociants », révèle l'IPIS.

Le secteur diamantifère congolais reste cependant profondément affecté par l'absence de contrôle et le non-respect du cadre légal. Selon l'IPIS, les transactions illégales sont monnaie courante dans les mines et jusque dans les bureaux des négociants, rendant quasiment impossible toute traçabilité du circuit commercial du diamant.

Si les règles exigent que les activités commerciales se tiennent en journée, de nombreux acteurs témoignent que les opérations les plus significatives se déroulent la nuit, loin de toute supervision officielle. Dans un tel contexte, le rapport indique que les négociants achètent fréquemment les diamants sans s'enquérir de leur origine, parfois auprès de mineurs, ce qui alimente un système d'approvisionnement parallèle.

« À Mbuji-Mayi, par exemple, une partie importante des diamants proviendrait d'exploitations illégales situées sur les concessions de la MIBA. Cette dynamique favorise également la fraude, la sous-évaluation et la contrebande des pierres précieuses », précise cette structure indépendante dans son rapport.

Par ailleurs, malgré la révision du code minier en 2018, les efforts de régulation peinent à se traduire sur le terrain. Des initiatives comme celles menées entre 2011 et 2018 par la DDI, visant à enregistrer les mineurs artisanaux, n'ont pas suffi à intégrer durablement le secteur dans un circuit légal et transparent, indique l'IPIS.

Jean-Baptiste Leni

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