Les activités économiques tournent au ralenti dans la ville de Beni (Nord-Kivu), quelques jours après l’effondrement d’un pont sur la route Beni-Kasindi, l’une des voies reliant la RDC à l’Afrique de l’Est. Dans la région, les produits de première nécessité sont devenus rares et même le prix du carburant explose.
Au marché central de Beni-Kilokwa, d’habitude très fréquenté, plusieurs espaces sont vides, on ne peut qu’apercevoir des étalages sans marchandises. Marina N’simire attend depuis trois jours une cargaison en provenance de Kasindi.
« Regarde toi-même comme mon étalage est vide, je n'ai pas de marchandises. Je suis veuve et je ne sais pas comment nourrir mes enfants aujourd'hui. Je ne reçois plus le solde de mon mari militaire décédé. J'avais déjà passé une commande de 500 kilos de poisson à Kasindi, mais tout est bloqué à la suite de l'effondrement du pont. Les transporteurs me demandent 5 dollars pour la traversée de mes marchandises sur la rivière et 5 dollars pour la personne qui m'a aidée à acheminer le poisson jusqu'au pont. C'est beaucoup d'argent », explique Marina Kavira, vendeuse des poissons freins au marché de Kilokwa.
Et pour les produits qui se vendent encore comme l’essence, les prix flambent avec comme conséquence, l’augmentation du prix de transport. La course de moto est passée de 1000 à 2000 FC. Ce qui rebute les habitants qui parfois ne savent pas se déplacer.
« Les Kadhafi ne nous ont pas dit qu'il n’y avait plus d'essence en ville. Ils se sont réveillés le matin et ont fixé le prix du litre d'essence à leur manière. Le soir le litre était à 3300 FC mais le matin on s'est réveillé et on a acheté un litre d'essence à 5000 FC. Ils expliquent cette augmentation par l'effondrement du pont. Le service de l’économie est là mais ne fait rien pour réguler le prix. Nous avons décidé à notre tour de hausser le prix de la course mais les clients se font rares », raconte Kambale Kisuba, motocycliste trouvé au parking de Kilokwa.
Toujours aucune annonce quant à la réhabilitation du pont sur la rivière Lume. Pour le moment les autorités pensent entretenir une déviation temporaire. Pendant ce temps, les marchandises restent bloquées dans la cité frontalière de Kasindi, une inquiétude pour Gertrude Vihumbura, la responsable du patronat à Beni.
« Nous avons une seule voie, celle de Kasindi. Dès que le pont se casse, il y a directement un impact négatif sur le terrain. Si vous voyez bien, il n'y a même pas de circulation en ville de Beni. Il y a des produits de première nécessité qui viennent toujours de Kasindi comme la farine de maïs, le riz, l’huile végétale, le carburant. Le problème de carburant, aujourd’hui le peu de produits qui sont là, ils sont en train de se vendre lentement », explique Gertrude Vihumbira, présidente de la Fédération des entreprises du Congo (FEC), antenne de Beni.
Il n’y a pas seulement le secteur économique qui est touché par l’effondrement du pont. Cette situation affecte aussi les opérations militaires en cours dans la zone, note porte-parole de la coalition des armées congolaise et ougandaise qui combat les islamistes ADF. Le déploiement des différentes unités et l’acheminement de prisonniers arrêtés à Kasindi et qui doivent être auditionnés au parquet de Beni, sont entre autres mis en difficultés, explique le colonel Mak Hazukay, porte-parole militaire.
Pour rappel, le pont s’est effondré au passage d’un poids lourd en provenance de la cité frontalière de Kasindi en destination de la ville de Beni.
Yassin Kombi