En marge de l'ouverture de la session de mars, le sénateur Matata Ponyo est monté au créneau une fois de plus accusant le président du Sénat Bahati Lukwebo de violer la constitution en refusant d'appliquer l'arrêt de la Cour constitutionnelle suspendant des poursuites judiciaires à son encontre. Matata tient à reprendre ses immunités parlementaires et liberté des mouvements. A ce jour, il ne peut pas quitter Kinshasa.
"Nous avons tous suivi le discours du président (Lukwebo), c'est un ensemble de souhaits, de vœux pour que la session parlementaire se passe bien. Nous attendons de voir ce qui va se passer concrètement au cours de cette session. Je pense une seule chose est de se référer à la constitution mais une autre chose est de l'appliquer, d'entrée de jeu le président du Sénat se référait à la constitution en disant que l'ouverture de cette session s'inscrit dans le respect de la constitution (Article 115) mais il ne faut pas que la constitution soit respecté en partie, elle doit être respectée dans la totalité, dans la globalité", a déploré mardi 15 mars 2022 le Sénateur Matata Ponyo.
Pour lui, Bahati Lukwebo fait la honte du Sénat en refusant d'appliquer l'arrêt de la Cour constitutionnelle. Il le considère comme un “anti démocrate''.
"Moi-même je suis victime d'une injustice flagrante où on a la Cour constitutionnelle qui a pris un arrêt, qui a été rendu public en mettant fin à toutes les poursuites judiciaires à mon endroit mais le président du Sénat lui-même refuse d'appliquer cette constitution comment est-ce que le président du Sénat peut se référer d'une part à un article de la constitution et de l'autre côté refuser d'appliquer d'autres articles. Donc il faut inviter le président du Sénat à ne pas faire le jeu de l'anti démocratie, la démocratie c'est le respect dans la globalité de la constitution. C'est une honte pour aujourd'hui de voir qu'un Sénat qui est le creuset des valeurs démocratiques refuse d'appliquer l'arrêt d'une Cour constitutionnelle", a indiqué Matata Ponyo.
Il a émis le vœu de voir cette question être alignée au cours de cette session pour un débat entre sénateurs.
"Nous souhaitons que cette question qui est pratiquement évacuée par le président du Sénat fasse l'objet d'un débat dans cette salle qui est le creuset de la démocratie, on ne peut pas accepter que le président du Sénat qui est censé protéger les droits de tous les sénateurs s'attaque à un sénateur. Il a dit qu'il faut que les sénateurs déposent le rapport des vacances parlementaires mais de l'autre côté il a refusé à ce que le sénateur Augustin Matata aille en vacances parlementaires, comment est-ce que le sénateur Augustin Matata va présenter un rapport sans y avoir été et du fait que le président du Sénat s'est opposé à l'application d'un arrêt de la Cour? Il faut éviter le folklore politique, nous sommes dans un État en développement qui a besoin des actions et non pas du folklore politique", a dénoncé Matata Ponyo
Face aux multiples revendications de M. Matata, lors d'une plénière à la dernière session parlementaire, Bahati Lukwebo disait n’être toujours pas saisi par les instances judiciaires sur une quelconque décision concernant l’ex-Premier ministre.
Matata a déjà même sollicité l’implication personnelle du Chef de l’Etat dans son dossier afin qu’il recouvre ses libertés.
Contexte
Matata Ponyo, ancien Premier Ministre, Patrice Kitebi, ancien Ministre délégué aux Finances, et Christo Grobler, responsable de la société sud-africaine AFRICOM, étaient poursuivis par le procureur général près la Cour constitutionnelle pour détournement présumés de plus de 200 millions de dollars américains dans le cadre du projet Bukanga Lonzo. La Cour constitutionnelle s'était déclarée incompétente dans l'affaire dans cette affaire. Statuant sur les exceptions soulevées par les avocats de trois prévenus, la Cour avait relevé qu'elle n’est compétente que pour juger le Président de la République et le Premier ministre pour les infractions commises par eux dans l'exercice de leurs fonctions et même en dehors de celles-ci ainsi que pour juger leurs coauteurs et complices. Cette compétence constitue un privilège de juridiction qui prend fin à la cessation de fonction de Président de la République et du Premier ministre et ces derniers redeviennent alors justiciables des juridictions ordinaires. La Cour avait ainsi relevé que Matata Ponyo n'étant plus Premier ministre, n'est plus justiciable de sa juridiction et ses co prévenus aussi ne relèvent pas de sa compétence.
Clément Muamba et Berith Yakitenge