L'AGOA est un piège remodelé pour l'auto-asservissement des Congolais aux profits des caprices des Américains (Tribune de JO Sekimonyo)

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PAR Deskeco - 28 déc 2020 08:10, Dans Analyses

La capture, la vente et l'achat des esclaves est une traite qui existait dans le monde entier depuis l'Antiquité et était également universel. Au 15ème siècle, des vilains africains comme le roi Diogo ont été pour beaucoup dans l'africanisation de cet horrible commerce. Leurs actes mènent finalement à l’extinction de la notion selon laquelle les Noirs sont des humains. Ainsi, les Européens n’éprouvaient aucune gêne lorsqu’ils achetaient des Africains en cage et vendus par d’autres Africains. Il y a aussi James Chuma et Abdullah Susi, tous deux Africains comme autant d’autres au 19ème siècle, qui n’ont toujours pas reçu les éloges déshonorants pour avoir pris soin et guidé David Livingstone dans le continent noir ainsi que tant d'autres expéditions européennes de la sorte sur lesquelles les négociations et les formalisations de revendications territoriales en Afrique par des grandes puissances européennes ont été établis.

La motivation de l'exploitation économique et sociale du roi Léopold II ainsi que les nations d'Europe est restée la même au fil de temps. Mais tout comme la traite négrière s'était troquée en colonisation, et après de multiples phases telles que le parrainage d'êtres pervers et idiots à la tête des états africains, et par le fait que le nombre d'exploiteurs a explosé, les astuces et les arguments de la politique économique sur lesquels ces abus se perpétuent ont été sophistiquée enfin de réduire la culpabilité morale des citoyens des pays riches.

Les accords commerciaux actuels entre les États-Unis, ou la Chine, la Russie et l'Afrique, rappelle étrangement l'époque de la conquête coloniale de la manière que ces nations jettent leur dévolu sur les immenses richesses de l'Afrique. Tenant compte des acteurs et facteurs ci-dessus l'annonce de l'entrée de la RDC dans l'African Growth and Opportunities Act (AGOA) devrait faire grincer des dents tous les congolais. La rhétorique de la bienveillance américaine et du souci du bien-être des congolais en accordant des préférences commerciales pour l'entrée aux États-Unis des certaines marchandises en provenance de la RDC afin de stimuler son économie nationale en encourageant les exportations est profondément et dangereusement trompeuse. Pour démystifier cette notion, nous devons nous poser les vraies questions : l'AGOA pourrait-elle transformer la RDC en une économie de grande valeur, ou faciliter l'extraction et l'exploitation ?

En premier lieu il faut souligner que le président américain se réserve le droit de réévaluer chaque année l'éligibilité à l'AGOA de chaque pays. En plus, du fait que l'AGOA oblige ses bénéficiaires à supprimer les obstacles à l'investissement américain, la balance commerciale est fortement en faveur des États-Unis. C’est que la RDC doit s'orienter vers « l'élimination des barrières au commerce et à l'investissement américains », ouvrant les marchés congolais à un flot de marchandises américaines qui sapent inévitablement l'industrie locale.

L'AGOA est également conçue pour faciliter l'extraction du pétrole et des minéraux par les compagnies américaines implantées en Afrique. Par exemple, dans le cadre de l'AGOA, 99 pour cent de l'ensemble des exportations de l'Angola, du Nigéria, du Botswana et tous les autres pays riches en pétrole et minéraux sont liés à l'énergie. Comme l'AGOA ne stipule pas que les entreprises exportatrices doivent être congolaise, et autant plus que tout le pétrole de la RDC et la plupart de ses minerais sont contrôlés par des entreprises occidentales et anglo-américaines, il ne s'agit guère d'un arrangement destiné à bénéficier aux entreprises congolaises.

Jetons un coup d’œil sur le talon d'Achille de la création d'emplois en RDC, et surtout bien rémunérés. L'AGOA n'exige pas que les nouveaux emplois reviennent aux nationaux tout encourageant le développement des zones franches d'exportation (ZFE) alors que les lois du travail sont risibles et que les salaires des nationaux sont terriblement dégoûtants. On peut déjà projeter que les emplois que l'AGOA pourrait créer pour les congolais seront profondément humiliants socialement et économiquement. Déjà ailleurs, des ateliers de misère asiatiques se déplacent déjà en Afrique pour profiter de l'AGOA.

Les États-Unis, tout comme la Chine ou les Européens, se soucient moins du bien-être des congolais que de la satisfaction de leurs propres besoins énergétiques et de la promotion des intérêts de leurs entreprises. Par l'AGOA, les Américains lance un signal visible et ferme qu’ils ne veulent pas perdre leur morceau ou rater une bonne chance d'obtenir une nouvelle part du magnifique gâteau congolais. L'AGOA n'est rien de plus qu'un piège remodelé pour l'auto-asservissement des congolais aux profits des caprices des américains, ce qui retarderait plus la maturité social et économique de leur nation.

Et si l'impossible pourrait arriver ? L'AGOA exigeait que les nouveaux emplois reviennent aux nationaux. Au lieu de transformer la RDC en un grand batey, l’AGAO contraignait une entreprise Américaine tel que Telsa Inc. d’implanter une usine de batterie de voitures électriques en RDC. Les Congolais comme n'importe quel pays du tiers monde manquent de moyens de qualité pour participer à une entreprise ou à un dialogue moderne. En Angola, par exemple, la plupart des ingénieurs d'Exxon sont américains. Toutefois, les congolais pourraient exiger que tous les investissements étrangers dans le pays devraient s'élever sur une période donnée à au moins 80% de main-d'œuvre locale et de contrats locaux et exiger des investissements dans les capacités locales là où elles s'avèrent trop faibles pour répondre aux normes nécessaires. La motivation et / ou la naïveté des Diogos, Chumas et Susis actuels qui sont comptés à parts égales parmi la diaspora et les gens qui n'ont jamais voyagé à 10 mètres de leur patrie constituent un blocage a ce genre de mesure audacieuse, ce qui est en effet un poison plus puissant pour le développement économique et social de leurs nations.

Ce qui rend les slogans gagnant-gagnant tel que l'AGOA si attrayants c'est notre incapacité de déchiffrer où se trouve le piège. Nous devons admettre que nos centres du savoir persistent à cultiver la notion primitive et élitiste de la motivation humaine en manufacturant des têtes pleines d'informations, pour la plupart expirées, qui sont toujours super excitées de répondre aux questions de manière arrogante. Multiplier les écoles de formation vocationnelle n’est pas la solution car déverser des milliers des ouvriers dans un écosystème à grande vitesse dans un écosystème où l'État est lui-même le premier tueur en série de l'entrepreneuriat serait un autre faux pas à grande vitesse.

Le programme éducatif congolais devrait, au lieu de cela, élever la qualité de la poursuite individuelle de l'amélioration des expériences des autres humains en produisant des têtes bien faites capables de faire une pause, de raisonner, produisent des idées qui ne sont pas nécessairement physiquement utiles à première vue mais qui suscitent la curiosité et l'errance cérébrale, puis de résoudre des problèmes localement avec une vision globale en toute humilité. C'est le moyen de déjouer dans le futur les pièges tels que l'AGOA. Après tout, la modernisation des motivations, des aspirations, des rêves et des objectifs des citoyens précède l'industrialisation d'une nation.

Jo M. Sekimonyo

www.sekimonyo.com

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