La cité de Minova (Sud-Kivu) occupée depuis lundi par les rebelles du M23 était restée depuis plus d’une année, le principal centre d’approvisionnement en denrées alimentaires pour la ville de Goma déjà asphyxiée depuis que cette rébellion s’était installée dans plusieurs agglomérations des territoires de Rutshuru et de Masisi.
Au marché de Kituku, l’un des plus importants situé sur la rive du lac Kivu, dans l’ouest de la ville de Goma, où les produits vivriers en provenance de Minova affluent habituellement en grand nombre, on peut clairement sentir le désastre ce mercredi.
L’impact de la présence du M23 est visible à Kituku, a constaté DESKECO.COM. Les prix des denrées alimentaires ont explosé.
Un tas de feuilles de manioc qui se vendait à 500 francs congolais il y a à peine quelques jours, coûte désormais entre 1 500 et 2 000 francs congolais.
L’avocat et d’autres fruits ainsi que d’autres produits phares en provenance de Minova, connaissent aussi une hausse significative. Ils sont surtout rares. Marie-Jeanne, une commerçante des feuilles de manioc habituée de ce marché s’inquiète :
« Avant, je pouvais acheter plusieurs tas de feuilles de manioc à un bon prix pour les revendre ici. Maintenant, je ne sais même pas si je pourrai continuer ce commerce. Tout est trop cher. D’ailleurs, il n’y a plus rien qui arrive, ce sont les déplacés qui viennent sans marchandises parce qu’ils fuient la guerre », explique-t-elle.
Pour les consommateurs, la situation est encore plus difficile.
« Je viens ici chaque jour pour acheter à manger pour mes enfants. Aujourd’hui, je n’ai même pas pu acheter un tas de feuilles de manioc. Je viens souvent avec 5 000 francs congolais et je rentre à la maison avec la nourriture au complet. Maintenant, je viens juste d’acheter quelques petits fretins que nous allons griller et manger. Comment allons-nous survivre si ça continue comme ça ? », s’interroge Pascaline Kamale Bwira.
Au-delà de la hausse des prix, une autre inquiétude plane sur Goma : le risque que le M23 bloque les accès à Minova.
Cette cité est restée la seule parmi les rares qui approvisionnaient en vivres non seulement la ville de Goma, mais aussi celle de Bukavu.
« Si le M23 décide de couper toutes les issues, Goma va suffoquer. Déjà, les pirogues aident à évacuer seulement certaines personnes qui se sont sauvées parce qu’il y a des affrontements terribles et les vivres ne peuvent plus arriver. Ça parce qu’ils sauvent d’abord leurs vies », confie Justin Bisimwa, armateur.
Ambiance morose
Entre la peur de l’insécurité et la flambée des prix, les habitants de Goma tentent tant bien que mal de s’adapter à une situation qui semble évoluer rapidement.
« Nous sommes pris en otage », lance Marie, une commerçante. « Nous espérons que tout cela ne durera pas, mais pour l’instant, c’est nous, les petits, qui en payons le prix. »
Dans un communiqué publié tard ce Mercredi le gouverneur du Nord-Kivu annonce «l’interdiction, jusqu’à nouvel ordre, de la navigation diurne et nocturne des petites embarcations (pirogues) sur le lac Kivu », « en raison de l’aggravation de l’insécurité causée par l’agression rwandaise opérée sous le label du M23/AFC ».
Depuis l’occupation de Masisi, Rutshuru et d’autres villages, les denrées alimentaires ont connu une rareté et du coup une hausse de prix sur le marché à Goma. Le Rwanda se positionne désormais comme la seule source d’approvisionnement de la ville de Goma à part les marchandises qui proviennent d’autres pays de l’Afrique de l’Est comme l’Ouganda, le Kenya et la Tanzanie.
Yvonne Kapinga, à Goma