Du 14 mai 2013 au 5 juillet 2021, Déogratias Mutombo Mwana Nyembo, aura passé 8 ans comme gouverneur de la Banque centrale du Congo. De ses nombreuses réalisations à la tête de l’Institut d’émission, il y a lieu d’indiquer que l’opérationnalisation du "Switch Monétique national" reste une réforme centrale dans le développement du secteur financier de la RDC. Un héritage précieux que Mme Malangu Kabedi Mbuyi, nouvelle patronne de la BCC devra capitaliser.
Focus sur le "Switch Monétique national"
De la première interopérabilité monétique en RDC, baptisée « Multipay » lancée en 2015, au Switch Monétique National opérationnel depuis décembre 2020 et qui concrétise l’interopérabilité totale des systèmes des paiements électroniques en passant par le système de Règlement Brut en Temps Réel « RTGS » et le logiciel ISYS-REGIES qui informatise la chaine de la recette, la Banque Centrale du Congo, sous la direction de Déogratias Mutombo, a marqué un pas de géant dans le développement du secteur financier dans le pays.
Lancé le 23 décembre 2020 par le gouverneur de la BCC, Déogratias Mutombo Mwana Nyembo, cette plateforme digitalisée va permettre que les cartes de paiements ou les instruments de paiement électronique émis par une institution financière (Banque, Etablissement de monnaie électronique, Société de microfinance, Coopérative d’Epargne et de Crédit ou une messagerie financière) soient acceptés dans le système et les automates d’acquisition de toutes les autres institutions financières de la place. Autant dire que le « Switch Monétique National » vient concrétiser l’interopérabilité totale et complète dans le paysage des paiements électroniques en République Démocratique du Congo.
L’interopérabilité des paiements désormais un acquis
A son inauguration en décembre 2020, le switch monétique national a expérimenté cette interopérabilité des paiements électroniques avec 4 banques commerciales à savoir United Bank of Africa (UBA), Bank of Africa (BOA), Sofibanque et Access Bank. Au sein de ces institutions financières, des comptes ont été ouverts pour l’émission des cartes bancaires en faveur d’un nombre restreint d’utilisateurs afin de réaliser ou de tester, grandeur nature, un certain nombre de transactions prédéfinies, notamment les retraits DAB/GAB, les paiements par TPE et la consultation des soldes avec la possibilité d’imprimer le ticket.
Quant aux autres banques commerciales, elles poursuivent les tests d’interfaçage entre leur système et la plateforme monétique nationale pour rejoindre le Switch, suivant un calendrier approuvé par la Banque Centrale du Congo. Dès lors, les Etablissements de Monnaie Electronique de la place (MPESa, Orange money, Airtel money et Afrimoney ainsi que le Switch Multipay), du reste déjà connectés au réseau de communication interbancaire, vont également rejoindre le Switch monétique national pour pouvoir interopérer avec les autres acteurs de l’écosystème national des paiements du pays. Selon la BCC, ce processus se poursuivra jusqu’à connecter les autres opérateurs des systèmes de paiements.
Il sied d’indiquer que cette plateforme comprend, outre le Switch Monétique National, un Centre de personnalisation des cartes de standard international destiné à la production locale de la carte bancaire nationale baptisée « Mosolo ». Cette plateforme monétique nationale est une infrastructure composée d’un environnement de traitement des transactions par carte ou par monnaie électronique et des automates d’acquisition des instruments de paiement (TPE, DAB, GAB).
Volet règlementaire
Le lancement de ce Switch Monétique National consacre donc la naissance d’une interopérabilité globale en RDC parce qu’elle implique la Banque Centrale, les Banques Commerciales, les Etablissements de Monnaie Électronique, les Institutions de Micro Finances, les Coopératives d’Epargne et de Crédit, les Messageries Financière et les innovateurs catégorisés comme prestataires des services connexes.
Pour promouvoir le développement de l’activité monétique en RDC et, plus globalement, l’innovation dans le secteur des paiements, la Banque centrale a édicté une règlementation (sous forme des instructions) en 2020. L’Instruction n°42 définit les exigences minimales applicables au secteur de la monétique en RDC avec un point d’orgue sur les diligences propres aux innovateurs dit « prestataires des services critiques » (institutions non financières facilitant les paiements).
L’Instruction n°48 normalise la carte de paiement locale interbancaire « Mosolo ». Celle-ci sera émise et acceptée par l’ensemble des acteurs du secteur financier Congolais aussi bien pour le paiement des biens et services que pour la collecte des recettes de l’Etat et la paie des fonctionnaires.
Des avantages indéniables
Cette réforme du secteur monétique en RDC s’inscrit dans la ligne droite du Plan national numérique initié par le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi. Elle présente des avantages et des opportunités indéniables pour le pays. Non seulement elle assure la facilité dans le dénouement des transactions financières domestiques, mais aussi permettra au gouvernement d’améliorer la collecte et la traçabilité de ses recettes publiques par le biais des programmes d’acceptation des paiements par carte ou par voie électronique dans les administrations publiques, les ministères, les tribunaux et cours de justice, les universités, la police nationale, les communes, etc.
Tout aussi, les licences, taxes, pénalités et autres charges administratives, pourront-elles être payées par carte ou par voie électronique, peu importe la banque du titulaire de la carte. Ce, dans un environnement interopérable.
Selon les experts de la Banque centrale, le Switch monétique national devrait permettre au Gouvernement de la République d’atteindre son objectif de diversification des canaux et méthodes de paiement pour la perception et le paiement des taxes et impôts dus à l’Etat.
De même, l’Exécutif national et les agences internationales (PNUD, FAO, HCR, UNICEF) utiliseront les cartes de paiement notamment celles de type prépayé pour distribuer des fonds publics tels que les allocations de la Sécurité Sociale, les fonds de soutien à l’enfance, les allocations des populations déplacées et des réfugiés, les fonds destinés aux militaires, etc. Pour les initiateurs de cette réforme, ce processus est nettement moins couteux car exempté des frais de transport du cash vers les points de distribution et peu enclin à la fraude (bénéficiaire fictif ou illégitime) du fait de l’automatisation de bout en bout du système.
Bien plus, cette plateforme digitalisée des paiements, dans l’optique de l’inclusion financière, entrainera l’augmentation du nombre de comptes des transactions et contribuera à une réduction progressive du poids des services financiers informels.
Précisons que c’est dans le cadre du Projet de Modernisation du Système National des Paiements que la Banque Centrale du Congo, avec l’appui de la Banque mondiale, a signé un contrat avec la firme « BPC » pour la fourniture et l’implémentation d’une plateforme monétique et d’un centre de personnalisation des cartes pour la RDC.
Amédée Mwarabu