Le professeur Mathias Buabua wa Kayembe vient de porter une analyse critique sur le « Plan de Trésorerie » du ministère des Finances qui réduit notamment les recettes fiscales et non fiscales du Budget 2020 à plus de 31%, selon le calcul de DESKECO.COM.
De prime à bord, le directeur général honoraire de l'ANAPI (Agence nationale pour la promotion des investissements) considère qu’un Plan de trésorerie qui coupe littéralement le budget, initialement voté au Parlement à plus de 10 milliards USD, en deux, pose le problème « de la sincérité tant des prévisions que des crédits définitifs votés au budget pour l'exercice 2020 ».
« Le ministère des Finances devrait sélectionner les hommes à même de l'aider à maximiser les recettes et arrêter la stratégie quant à ce. Il paraît prématuré en début d'année, de faire une projection sur l'ensemble de l’année. Et comme un Plan de Trésorerie ne saurait remplacer un budget, s’il résultait des indices persistants que la situation se détériore, le mieux à faire serait de rédiger un collectif budgétaire et de rentrer au Parlement », soutient le professeur Buabua wa Kayembe dans son analyse qu’il motive en quatre points suivants :
1) S'agissant du budget 2020, on (l'opinion) est parti du fait qu'un pays de la trempe de la RDC, ne peut pas tenir avec un budget de 3-4 milliards de $ à côté de l'Angola, avec 20 millions d'habitants, dont le budget est de 35 milliards de dollars. Le budget 2020 est par conséquent celui de changement, de rupture, très volontariste. Il nécessite que des efforts tangibles et quantifiables de mobilisation soient fournis dans les services mobilisateurs.
2) A partir de là, il ne faudrait pas que l'analyse parte des résultats de 2018-2019 pour faire une projection sur 2020 sans tenir compte de la nouvelle mission confiée aux régies.
3) Partir des réalisations de janvier et février 2020 pour faire une projection sur l'ensemble de l'année me semble quelque peu prématuré. Au mois de janvier et février, les chefs d'entreprises ne sont pas encore rentrés des vacances. Les affaires n'ont pas encore repris. Et les recettes sont très faibles. Il me semble prématuré de tirer des conclusions sur l'année.
En janvier et février, nous sommes sur la ligne de départ. Le Ministère des finances devrait être en train de peaufiner les stratégies pour en finir avec les fausses déclarations et les sous-évaluations et sélectionner les hommes à même de l'accompagner dans cette tâche après tout laborieuse. On sait que les recettes commencent à venir vers mars-avril en prenant toute leur ampleur vers juin juillet jusqu'à la fin de l'année.
4) Je suis d'accord qu'une forte pression est exercée sur les dépenses budgétaires par les programmes tels que la gratuité de l'enseignement, la paie des agents du secteur public ou les dépenses d'investissement. Mais, c'est ça que la population souhaite, un budget devant nécessairement avoir un impact économique et social. N'empêche que toutes ces dépenses soient planifiées dans le temps. Il appartient, du reste, aux services compétents de montrer de quelle manière ils peuvent accompagner le gouvernement dans ses choix. S'agissant des recettes, j'ai tiré la sonnette d'alarme par rapport aux mauvaises nouvelles en provenance de la Chine. Mais, il s'agit d'une situation mondiale, on ne sait pas le temps que ça va prendre et de quelle manière pourra rebondir l'économie chinoise. En attendant, pourquoi ne pas se concentrer sur la mobilisation des recettes internes?
Le professeur Buabua wa Kayembe est auteur de plus d'une dizaine d'ouvrages scientifiques et littéraires. Professeur ordinaire à l’Université de Kinshasa (Unikin) et à l’Université protestante au Congo (UPC), Mathias Buabua a été Inspecteur général des finances et est directeur général honoraire de l’Agence nationale pour la promotion des investissements.
Amédée Mwarabu