RDC: l'impératif de la maximisation des recettes passe par la lutte contre la corruption

PAR Deskeco - 29 jan 2019 08:38, Dans Actualités

La République démocratique du Congo compte environ 80 millions d'habitants répartis sur les 2 345 410 km2 de superficie. Le Congo Kinshasa est donc un pays peuplé et vaste. Cependant, le Produit intérieur brut (PIB) du pays est d'à peine 50 milliards USD fin 2018, donnant un PIB par habitant de 400 USD par an.

Ce qui fait que les 5 milliards de budget que la RDC avait en moyenne ces cinq dernières années ne peuvent ni permettre un fonctionnement normal des institutions de la République ni améliorer les conditions de vie des populations encore moins assurer les investissements nécessaires en vue de doter le pays des infrastructures adéquates devant favoriser la compétitivité des entreprises.

Les recettes publiques représentent donc environ 10% du PIB national. Ce qui est faible tant pour le fonctionnement de la République que pour booster l'économie nationale. Il faut réaliser en recettes publiques au moins 20% du PIB national pour espérer avoir les moyens de sa politique. Autant dire que le premier défi à relever en RDC est celui de la mobilisation des recettes publiques.

Ce qui implique non seulement l'élargissement de l'assiette fiscale mais aussi une lutte acharnée contre la corruption afin de maximiser la mobilisation des recettes publiques.

La nécessité d'un cadre juridique efficace

« Chaque année, nous subissons entre 16 et 20 milliards de dollars d’évasion fiscale, soit quatre fois notre budget annuel. Nous devons inverser cette tendance". C'est le constat fait par le président de la République, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, lors de son discours d'investiture le 24 janvier au Palais de la nation à Kinshasa.

Bien plus, le nouveau chef de l'Etat préconise un système pour maximiser justement les recettes. "Un mécanisme de guichet unique attrayant, une simplification des procédures fiscales et douanières seront institués afin de permettre à l’ensemble de nos acteurs nationaux et étrangers de s’inscrire dans une démarche légale bénéfique pour toutes les parties", à dit le président de la République.  

Il mise aussi le renforcement du  cadre judiciaire.« Un cadre juridique efficace permet de renforcer en premier lieu la lutte contre la corruption, fléau qui dévaste notre pays, ses institutions et ne protègent pas les créateurs de richesse. Nous allons initier une stratégie de lutte contre la corruption dans l’ensemble des rouages de l’Administration publique. Un accent particulier sera porté sur la lutte contre la délinquance fiscale. Afin de valoriser l’Etat de droit, nous allons procéder au renforcement de la sensibilisation au civisme fiscal », a soutenu le chef de l’Etat.

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Le FMI pour la diversification de l'économie congolaise

Au Fonds monétaire international, on soutient également la même thèse qu'une des causes de thèse de la faiblesse de la mobilisation des recettes. Une des cause de la fragilité de l’économie congolaise est, selon le Représentant résident du FMI en RDC, Philippe Egoume, “ la politique budgétaire pâtit de la faible mobilisation des recettes et des problèmes de crédibilité du budget ».

L'expert du FMI avait fait observer, lors d'un échange avec les journalistes en novembre 2018 alors qu'il commentait les perspectives économiques de l'Afrique Centrale, : « la capacité de mobilisation des recettes continue de baisser d’une année à une autre et reste de loin inférieure à la moyenne des pays de l’Afrique Sub-saharienne, dans un contexte d’augmentation de la part des recettes issues du secteur extractif dans le total des recettes publiques ».

En effet, selon les chiffres du FMI, la RDC a réalisé, en pourcentage du PIB, 13.2 (2014); 12.6 (2015) ; 9.7 (2016); 8.2(2017) et 7.0 (fin septembre 2018) de recettes courantes (hors don) alors que dans les pays de l’Afrique sub-saharienne elles ont varié entre 19 % et 16 % en moyenne pendant la même période.

«En 2017, les recettes en pourcentage par rapport au PIB de la RDC ne représentent même pas la moitié de la moyenne de l’Afrique sub-saharienne. Comment va-t-on financer les opérations de l’Etat ? Comment va-t-on financer le fonctionnement de l’Etat si on ne peut pas mobiliser des recettes? Avec 8.2% des recettes courantes du PIB réalisées en 2017, on ne peut que faire du fonctionnement malheureusement. C’est extrêmement petit par rapport à ce qui est requis pour prendre en charge les dépenses de l’Etat », avait soutenu le représentant du FMI en novembre 2018, faisant une analyse sur l'économie de la RDC.

Philippe Egoume est plus loin en faisant remarquer le danger qui pèse sur la dépendance de la RDC des recettes minière. En effet, la contribution des recettes minières dans les recettes de l’Etat est en constante augmentation atteignant 38%. Or, le secteur minier représente à lui seul 27% dans l’économie nationale.

« Il y a un risque que si les cours des matières premières s’écroulent, ces recettes chutent avec…Le pays est tributaire de la bonne tenue des cours qui peuvent se maintenir ou peuvent ne pas. Il y a une sorte d’épée de Damoclès qui est au-dessus du gouvernement en termes de recettes », avait-il dit.

« Les recettes générées par l’économie en générale sont très faibles. Une bonne partie de ces recettes est générée par le secteur minier qui lui-même est extrêmement sensible au changement des prix. Il y a une très forte vulnérabilité de l’Etat au secteur minier. Ceci veut dire qu’il y a nécessité de trouver des moyens de générer des recettes additionnelles venant du secteur non minier. Il faut mettre en place des politiques pour encourager des politiques non minières », notait l’expert du Fonds monétaire international qui avait précisé que le secteur extractif contribue à 60% de la croissance économique de la RDC.

Le gouverneur de la banque centrale du Congo, Deogratias Mutombo, a toujours plaidé aussi pour la diversification des sources de revenus pour éviter ce que la RDC a connu en 2016, la chute de la croissance économique (2,4%) et la perte de 1 milliard USD suite à la baisse des cours du cuivre et du cobalt.

Amédée Mwarabu

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